Menacé par la montagne, un village grison risque de disparaître
Le village grison de Brienz-Brinzauls pourrait bientôt être définitivement rayé de la carte du pays. Situé à flanc de montagne, il recule d'année en année, à tel point qu'il pourrait être victime d'un terrible éboulement. Si le village ne se stabilise pas, les autorités envisagent à terme de déplacer l'entier de sa population.
Niché dans la vallée de l'Albula, Brienz-Brinzauls est une parfaite image de l'idylle alpine, ce que les professionnels du tourisme de la région appellent une "terrasse ensoleillée".
Pourtant, lorsqu'on s'y promène, on s'aperçoit assez rapidement que cette tranquillité n'est que de façade. En effet, les panneaux mettant en garde contre les chutes de pierres sont nombreux. Une équipe de la RTS partie en reportage a d'ailleurs elle-même été surprise par un petit éboulement.
Une zone géologiquement instable
Pour Andreas Huwiler, géologue qui fait partie des spécialistes qui suivent en permanence l'évolution du danger, cette situation n'est pas surprenante: "Des éboulements de ce type ne sont pas rares. En 2020, nous avons eu plus de mille chutes de pierres ou de rochers."
Brienz-Brinzauls est en effet situé dans une zone géologique particulièrement instable, relève Andreas Huwiler, interrogé samedi dans le 19h30: "D'une part, nous avons un glissement du village. Il se déplace aujourd'hui très rapidement, entre 1,10 et 1,20 mètre par an. C'est énorme et bien sûr très dangereux pour les bâtiments. Le deuxième problème, c'est un glissement de la montagne qui surplombe le village et qui, c'est notre crainte, pourrait provoquer un jour un éboulement susceptible de détruire Brienz."
Une peur palpable chez les habitants
Cela fait au moins 100 ans que Brienz glisse. Pourtant, pour une raison que les scientifiques ne parviennent pas encore à expliquer, le phénomène s'est nettement accéléré au cours des dernières années: 10 centimètres par an dans les années 1930, 50 au tournant du siècle et donc, jusqu'à plus d'un mètre aujourd'hui.
Le scénario catastrophe qui pourrait détruire le village prendrait la forme d'un énorme éboulement qui pourrait déverser jusqu'à 22 millions de mètres cubes de roche, soit sept fois plus que celui de Bondo (GR) en 2017.
Sans surprise, c'est donc un sentiment palpable de menace quotidienne que l'on ressent chez les habitants. Depuis quelques années, il est devenu impossible d'oublier cette épée de Damoclès.
Alors qu'un hélicoptère survole le village, un résident témoigne de cette atmosphère de crainte qui rythme la vie de la localité: "Cet hélicoptère, on le voit presque tous les jours. Il vient pour surveiller le glissement. Jusqu'à il y a environ un an, nous étions 120 habitants, aujourd'hui ce n'est plus que 70 environ. Il n'y a presque plus que les propriétaires qui restent. La plupart des locataires sont déjà partis."
Un village qu'il faudra peut-être abandonner
L'essentiel du travail de Daniel Albertin, le maire de la commune, s'apparente de plus en plus à celui d'une gestion de crise au jour le jour. Pour informer la population au mieux, la localité s'est même adjoint les services d'un spécialiste en communication.
Au final, les habitants de Brienz doivent aujourd'hui aussi s'habituer à ce que peut-être, un jour, si la situation ne stabilise pas, ils devront abandonner leur village.
Daniel Albertin ne préfère pas imaginer cette perspective "douloureuse": "Nous espérons de tout notre coeur que ce sera possible techniquement d'éviter de déplacer le village. D'éviter qu'un jour Brienz ne soit rayé de la carte."
Tout en gardant espoir, la municipalité se prépare donc au pire. Elle vient d'ailleurs de terminer une enquête pour savoir dans quel village avoisinant les habitants souhaiteraient être réinstallés, si cela devenait nécessaire.
Sujet TV: Séverine Ambrus
Adaptation web: Tristan Hertig
Publié Modifié