Gris, froid et imposant, le béton est omniprésent en Suisse, surtout depuis le début du XXe siècle. Si le béton moderne, à base de sable et de gravillons, a été développé en Angleterre et en France au XIXe siècle, la Suisse se l'est approprié.
"Le rôle du béton a été différent en Suisse que dans d'autres pays", rappelle Andreas Ruby, directeur du Musée suisse d'architecture à Bâle. "Ce n'était pas uniquement un matériau pragmatique et utile. Mais il s'agissait de la condition matérielle pour unifier le pays."
Ainsi, le béton a servi a relier la plaine et la montagne. Le béton a façonné le territoire et a accompagné l'urbanisation de la Suisse. Durant les Trente Glorieuses, le pays est le plus gros consommateur de béton. Ses matières premières se trouvant dans ses montagnes, la Suisse a aussi été un pays producteur.
"Il y a une connexion matérielle aux Alpes, parce que le gris des Alpes est le même que celui des bâtiments en béton. Il y a donc le sensation que le béton est un matériau qui appartient à la Suisse", explique Andreas Ruby.
L'esthétique du béton brut du Corbusier a beaucoup marqué l'esthétique du béton en Suisse. "C'est quelque chose que les architectes suisses ont cultivé. C'est un peu une sorte d'image esthétique de la construction suisse", ajoute-t-il.
Cette esthétique a souvent été critiquée: symbole de déshumanisation et de destruction du paysage.
L'exposition du Musée suisse d'architecture à Bâle s'arrête à l'orée notre époque, où la question climatique rend le tout béton de plus en plus anachronique. Elle dresse un bilan à la fois nostalgique et lucide sur cette aventure architecturale du XXe siècle.
Séverine Ambrus /vajo
A voir l'exposition "Béton" jusqu'au 24 avril 2022 au Musée suisse d'architecture à Bâle