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A Zurich, les médecins pourront délivrer des ordonnances pour des cours de danse

Zurich innove en autorisant ses médecins à délivrer des "ordonnances sociales": interview de Stéfanie Monod (vidéo)
Zurich innove en autorisant ses médecins à délivrer des "ordonnances sociales": interview de Stéfanie Monod (vidéo) / Forum / 5 min. / jeudi à 18:00
Les médecins zurichois pourront désormais délivrer des "ordonnances sociales" pour des cours allant du jardinage à la danse, en passant par les conseils en matière d'endettement. Une mesure qui convainc la spécialiste de la santé Stéfanie Monod, interrogée dans Forum.

Le Parlement de la Ville de Zurich a approuvé par 84 voix contre 34 cet essai qui coûtera 2,5 millions de francs. Quatre centres médicaux ambulatoires de la ville orienteront si nécessaire les personnes concernées vers des "Link worker" qui organiseront les offres appropriées.

Pour ses initiateurs, ce projet pilote est "une contribution importante à la santé publique", avec aussi l'espoir de soulager le système de santé. A l'inverse, le PLR et l'UDC s'y sont opposés en vain. "Les structures actuelles permettent déjà de couvrir les besoins", a critiqué un député PLR, estimant qu'il s'agit clairement de "gérer un problème de luxe aux frais du contribuable". "Il n'y a qu'à Zurich qu'on trouve ça", a lancé pour sa part un élu UDC.

Compléter le processus de guérison par des activités

Ces "ordonnances sociales" s'adressent aux patients pour lesquels le traitement médical seul n'apporte pas d'amélioration, comme ceux souffrant de douleurs chroniques ou d'un Covid long. L'objectif est de compléter le processus de guérison par des activités et de rompre l'isolement social. L'idée a été développée dans les années 1990 au Royaume-Uni sous le nom de "Social Prescribing". Le concept existe également depuis quelques années en Autriche.

L'individu n'est pas que biologique! [...] Nous sommes aussi des animaux sociaux

Stéfanie Monod, co-cheffe du Département épidémiologie et systèmes de santé à Unisanté

Pour la co-cheffe du Département épidémiologie et systèmes de santé au Centre universitaire de médecine générale et santé publique à Lausanne (Unisanté) Stéfanie Monod, cette mesure présente un intérêt certain. "L'individu n'est pas que biologique! Avec l'évolution de la médecine, on a eu tendance à penser que tout était mécanique et compréhensible au niveau des organes, mais en réalité, nous sommes aussi des animaux sociaux", a-t-elle réagi jeudi soir dans l'émission Forum de la RTS.

"Une personne complètement isolée va moins bien vivre sa problématique de santé, avoir peut-être plus de dépressions, de tristesse... On a besoin de ces contacts sociaux, d'activités qui nous permettent de sortir de certaines difficultés et souffrances chroniques", justifie la spécialiste.

On a conçu l'assurance maladie autour de prestations souvent techniques, mesurables, labellisées... Mais additionner ces prestations n'aboutit pas forcément à une amélioration de l'état de santé ou de la qualité de vie

Stéfanie Monod

Plusieurs types d'affections pourraient tirer des bénéfices de ces ordonnances sociales. "Je pense à toutes les maladies chroniques au long cours qui pèsent beaucoup sur le moral et restreignent le périmètre social", liste Stéfanie Monod.

Bon pour les coûts de la santé

"On a conçu l'assurance maladie autour de prestations souvent techniques, mesurables et qui ont été labellisées par le corps médical. Mais additionner ces prestations biomédicales n'aboutit pas forcément à une amélioration de l'état de santé ou de la qualité de vie", pointe aussi la médecin d'Unisanté. A ses yeux, seule une approche plus globale permettra de venir à bout du nombre croissant de patients atteints de maladies au long cours et qui ne guérissent pas par les moyens traditionnels de la médecine.

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Une telle approche aura à coup sûr des bénéfices sur les coûts de la santé, car "s'il y a moins de dépressions, il y a moins d'hospitalisations et d'autres complications", conclut Stéfanie Monod.

Propos recueillis par Renaud Malik

Adaptation web: Vincent Cherpillod avec l'ats

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