La cour a retenu tous les chefs d'accusation requis par le Ministère public: assassinats, extorsion de fonds, séquestration, prise d'otages, acte d'ordre sexuel avec enfant, contrainte sexuelle, incendie intentionnel, pornographie, faux dans les titres et actes préparatoires.
L'internement est prononcé en raison de la gravité des faits, du risque de récidive, ainsi que des troubles psychiques et de la pédophilie qui ont incité le prévenu à commettre son crime. A travers cette mesure, le meurtrier ne pourra pas demander sa libération conditionnelle après 15 ans. Ce n'est qu'après une vingtaine d'années de réclusion que son internement sera réévalué régulièrement.
L'accusé âgé de 34 ans devra suivre une thérapie ambulatoire en milieux carcéral. Il devra aussi verser aux proches des victimes quelque 700'000 francs d'indemnités et de réparation pour tort moral.
Le tribunal n'a en revanche pas suivi la procureure au sujet de la mesure d'internement. Le Ministère public demandait l'internement à vie. Selon les deux experts auditionnés lors du procès, l'accusé peut être soigné à long terme, invoque le président. La condition légale pour un internement à vie - une impossibilité durable de traitement - n'est donc pas remplie.
"L'autoroute de l'horreur"
L'accusé "a pris l'autoroute de l'horreur", a déclaré le président du tribunal lors de l'énoncé du jugement. Il a exécuté le schéma qu'il avait en tête. L'abus sexuel sur la plus jeune victime, un adolescent de 13 ans, et l'assassinat de quatre personnes en faisait partie.
Le prévenu a agi "de sang-froid, de manière primitive sans pitié ni empathie", a déclaré le juge. Les victimes ont été massacrées sans aucun scrupule.
Le 21 décembre 2015 à Rupperswil, le prévenu a égorgé une mère de famille de 48 ans, ses deux fils de 19 et 13 ans ainsi que la petite amie (21 ans) de l'aîné au domicile familial de Rupperswil (AG). Avant cela, il a abusé sexuellement du fils cadet. Entré dans leur maison sous un prétexte, il y a bouté le feu avant d'en sortir.
ats/tmun
"Attentes autour du risque de récidive"
La question de l'incurabilité de l'accusé était au centre du procès du quadruple meurtre de Rupperswil.
"On est passés d'attentes autour de la responsabilité (...), à des attentes autour du risque de récidive, qu'on appelle souvent à tort la dangerosité", explique Philippe Delacrausaz, directeur du Centre d'expertise psychiatrique de l'Institut de psychiatrie légale du CHUV, invité vendredi de La Matinale
Il précise que "la question du risque de récidive peut être tout à fait indépendante du fait d'être soignable ou pas".
Mais n'est-ce pas inhérent au psychiatre de penser que l'on peut soigner? "Ce n'est pas une question d'avoir envie ou pas. C'est la question quel médecin est capable de faire un diagnostic de curabilité", répond Philippe Delacrausaz.
Il donne l'exemple d'un cancérologue qui aurait soigné un cancer, mais à qui "on ne demanderait jamais de faire un pronostic sur la vie entière"."A la psychiatrie, dans ces cas particuliers, on demande de faire des pronostics sur 30, 40, 50 ans, ce qui est impossible d'un point de vie scientifique", souligne celui qui a notamment expertisé le cas de Claude D. en 2008, lorsqu'il purgeait sa première peine de prison.
Il insiste aussi sur le fait que "l'expert psychiatre donne un avis, fait une évaluation", mais que la décision finale appartient au juge, qui n'y est pas tenu et a la possibilité de s'en écarter.
Son interview intégrale dans La Matinale