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Un long processus attend Moutier avant son transfert dans le Jura

Une longue transition s'annonce pour Moutier
Une longue transition s'annonce pour Moutier / Forum / 3 min. / le 29 mars 2021
Après la liesse populaire, c'est le retour à la réalité pour Moutier. Un long chemin attend en effet la cité prévôtoise avant qu’elle ne puisse intégrer le Jura. Les autorités jurassiennes parlent en effet de janvier 2026 au plus tôt. Mais quatre ans et demi ne seront pas de trop.

Si le Jura parle de 2026, c'est parce que cette année-là coïncidera avec le début de la prochaine législature dans le canton. Interrogée à l'issue du vote, la présidente du Gouvernement Nathalie Barthoulot estime toutefois que ce calendrier, qui devra être discuté entre les deux parties, est ambitieux.

>> Retour sur la journée de dimanche à Moutier : Liesse jurassienne à Moutier après le net oui dans les urnes

Car ne pas précipiter le transfert permettra d'offrir au plus vite aux Prévôtoises et Prévôtois tous les droits auxquels ils peuvent prétendre, et en premier lieu lors des élections cantonales jurassiennes prévues à l'automne 2025. L'objectif est en effet que des citoyens de Moutier puissent se présenter aux élections au Parlement jurassien, où sept sièges leur sont réservés sur les 60 à disposition. Idem pour l'élection du gouvernement, qui pourrait pourquoi pas voir un ou une élue de Moutier entrer à l'exécutif.

>> L'interview de Nathalie Barthoulot dans le 12h30 :

Nathalie Barthoulot, le 20 mai 2017. [Keystone - Peter Klaunzer]Keystone - Peter Klaunzer
Le transfert de Moutier vers le Jura d'ici 2026: Interview de Nathalie Barthoulot / Le 12h30 / 3 min. / le 29 mars 2021

Un délai de recours de 30 jours

Mais avant d'en arriver là, il subsiste plusieurs étapes obligatoires, qui vont prendre du temps. Il faut déjà patienter durant 30 jours pour que le résultat du scrutin entre en force. Formellement, le vote de dimanche peut encore faire l'objet d'un recours. Mais le score net, 374 voix d'avance pour le oui, soit près de trois fois plus que lors du vote annulé de 2017 (137 voix), va rendre les recours plus difficiles.

Si aucune contestation n'est déposée d'ici fin avril, c'est toute une machine administrative et juridique qui va entrer en mouvement. On ne change en effet pas de canton sur un claquement de doigt et huiler tous les rouages implique patience et précision.

Un concordat pour un partage des biens

Concrètement, les deux cantons de Berne et du Jura, en collaboration avec la municipalité de Moutier, vont négocier tous les détails pratiques du transfert dans un concordat. Pour l'établir, les parties devront trouver des accords, notamment sur le partage des biens. Par exemple, l'hôpital de Moutier appartient au canton de Berne et à un acteur privé. Est-ce que le Jura est intéressé à racheter la part bernoise et le canton de Berne est-il d'accord de la vendre. Idem concernant le Musée jurassien des Beaux-Arts, situé à Moutier. Le canton de Berne va-t-il rester membre de la fondation qui le gère, une fondation de droit privé à laquelle participent aussi le canton du Jura ainsi que la municipalité de Moutier. Et le Jura a-t-il des prétentions à ce sujet?

Comme souvent, les enjeux financiers seront prépondérants. Nathalie Barthoulot a précisé dans le 19h30 que si le canton de Berne se dessaisissait de ses infrastructures, "il faudra qu’on négocie un prix pour toutes les infrastructures que nous devrons racheter, et puis il s’agira là de définir sur quelles bases, comment, avec quelles valeurs".

>> Les précisions du 19h30 :

Moutier: long processus avant le transfert dans le canton du Jura.
Moutier: long processus avant le transfert dans le canton du Jura. / 19h30 / 2 min. / le 29 mars 2021

Au final, le concordat devra être accepté par les Parlements des deux cantons et par les populations bernoise et jurassienne avant d'être soumis sous la forme d'un arrêté aux Chambres fédérales. Alors seulement la ville de Moutier pourra rejoindre le canton du Jura.

Les discussions pourraient cependant débuter assez rapidement, mais les modalités sont encore à établir. Il semble probable que des contacts seront noués entre les chefs de service des deux administrations cantonales dès qu'ils auront reçu le feu vert. Dans le Jura, certains d'entre eux sont déjà très enthousiastes de pouvoir construire quelque chose de nouveau.

Normaliser les relations entre Berne et le Jura

Dans les faits certaines situations ne manqueront pas de piquant. Ainsi, concernant la prison de Moutier, son directeur est aujourd'hui un des conseillers municipaux anti-séparatistes. Or, sa cheffe sera à terme la ministre jurassienne Nathalie Barthoulot, notamment en charge de la justice.

Finalement, le canton de Berne pourrait-il mettre fin à certains engagements qu'il a en ville de Moutier, voire même avec le Jura? Cela semble peu probable, l'idée étant au contraire de normaliser autant que possible les relations entre deux cantons qui se sont parfois regardés en chiens de faïence, notamment dès que le sujet de Moutier venait sur la table.

Le transfert de Moutier ne devrait pas empêcher de nouvelles collaborations institutionnelles entre les deux cantons avec pour objectif commun une construction positive pour un nouvel avenir dans la région.

>> Retour sur la liesse populaire à Moutier dimanche dans Couleurs Locales :

À Moutier ville jurassienne, la fête jusqu'au bout de la nuit.
À Moutier ville jurassienne, la fête jusqu'au bout de la nuit. / Couleurs locales / 2 min. / le 29 mars 2021

>> Lire aussi : Moutier a tiré un trait indélébile sur la Question jurassienne, selon la presse

Sujet radio: Gaël Klein

Adaptation web: Frédéric Boillat avec ats

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Le bilinguisme bernois pas menacé, selon les autorités

Le départ de Moutier et de ses 7400 habitants du canton de Berne ne va pas menacer le bilinguisme, assurent les autorités cantonales, le Conseil du Jura bernois et le Forum du bilinguisme. Mais le Jura bernois pourrait assister à plus longue échéance à un affaiblissement de son poids politique.

Le Jura bernois perd sa commune la plus peuplée, soit 13,7% de sa population. Ne serait-ce que mathématiquement, le départ de la cité prévôtoise affaiblit, même si cela demeure très modeste, le poids de la minorité francophone. Le canton de Berne comptait à la fin 2019 1'039'474 habitants, dont environ 10% de langue française.

La région est surreprésentée au gouvernement et au Parlement. La constitution bernoise garantit au Jura bernois 12 sièges sur 160 au Grand Conseil et un siège sur sept au Conseil-exécutif. Ce statut particulier doit permettre à la région de préserver son identité et sa particularité linguistique et de participer à la vie politique.

Mais le départ de Moutier ne devrait pas manquer d'ouvrir le débat sur le maintien de ces acquis, même si le Grand Conseil a récemment renforcé la position du Jura bernois en adoptant une révision de la loi sur le statut particulier. Des députés germanophones pourraient toutefois remettre à l'avenir en question ces "privilèges".

"Pas de remise en cause des acquis"

"Il n'y aura pas de remise en cause des acquis", a assuré lundi le vice-chancelier du canton de Berne David Gaffino. Le bilinguisme continuera également à être encouragé et valorisé, a-t-il expliqué. "On reste le même canton bilingue", a souligné le vice-chancelier ajoutant que le canton de Berne continuera à jouer son rôle de pont entre la Suisse romande et la Suisse alémanique.

Le Conseil du Jura bernois (CJB), sorte de Parlement régional chargé de défendre les intérêts de la population, se veut aussi optimiste. "La question des prérogatives du Jura bernois sera abordée une fois que la Ville de Moutier sera partie et cela est légitime et normal", a expliqué sa présidente Virginie Heyer. Celle-ci ne se dit pas inquiète à propos du bilinguisme, jugeant que le canton tient à sa minorité francophone.

Même constat au Forum du bilinguisme qui ne s'inquiète pas non plus pour l'avenir des francophones après la votation de ce dimanche. "Je ne vois pas cela comme une menace", a expliqué sa directrice Virginie Borel. Relevant que le destin de Moutier étant clair, elle estime que francophones et germanophones pourront à présent œuvrer plus étroitement encore en faveur du bilinguisme.

>> L'interview de Virginie Borel dans Forum :

Moutier quitte Berne, un mauvais signe pour le bilinguisme? Interview de Virginie Borel
Moutier quitte Berne, un mauvais signe pour le bilinguisme? Interview de Virginie Borel / Forum / 5 min. / le 29 mars 2021