Alors que 4500 tonnes de munitions gisent au fond du lac, une équipe de plongeurs prélèvent un échantillonnage. "On aimerait voir s’il y a des matières explosives qui vont dans l’eau ou si une part de la pollution qui vient des sédiments se transfère aussi à l’eau", indique Sandie Pasche, spécialiste pour les substances explosives dans le domaine de compétence Sciences et technologies chez Armasuisse, mardi dans le 19h30.
Les dernières analyses remontent à 2015. Les échantillons d'eau avaient montré une hausse des concentrations de cuivre et de zinc après les tirs. Les relevés en métaux lourds étaient aussi détectables sur les sites de référence et dans les valeurs limites des ordonnances sur la protection des eaux et sur les substances étrangères et les composants. Mais jusqu’ici aucun prélèvement des sols n’avait été effectués, contrairement à la pratique en vigueur pour les stands de tir terrestre.
>> Lire aussi : Les munitions de l'armée s'entassent au fond du lac de Neuchâtel
Résultats prévus cet été
"Les nouveaux contrôles sont réalisés en prélevant des échantillons d'eau et de sédiments", a indiqué mardi Bruno Locher, chef territoire et environnement au DDPS. Onze échantillons sont prévus dans les zones de Forel (FR) et des anciennes cibles utilisées entre 1928 et 1929, avec des prélèvements en aval et en amont de la zone afin d'obtenir un point de comparaison.
Le concept d'échantillonnage a été discuté avec l'Office fédéral de l'environnement, les cantons de Fribourg, Vaud et Neuchâtel, ainsi que les riverains du lac de Neuchâtel, a détaillé le DDPS lors de sa présentation à la presse. Les associations Pro Natura et de la Grande Cariçaie sont également parties prenantes de l'opération.
Les prélèvements seront analysés en laboratoire et les résultats seront connus durant l'été et les acteurs concernés détermineront ensuite la nécessité ou non de prendre des mesures supplémentaires.
Le laboratoire de Spiez, de la division de l'Office fédéral de la protection de la population, se chargera d'analyser les métaux lourds. De son côté, la société Bachema à Schlieren (ZH) s'occupera des explosifs. L'intervention à Forel présente un coût de 10'500 francs.
Plus de nonante ans d'activité
Le site de Forel à Fribourg est utilisé depuis 1928. Il fait partie des trois dernières places pour l'entraînement des tirs air-sol des forces aériennes. Une dizaine de jours d'entraînement y sont programmés par an. D'autres exercices militaires sont aussi menés sur place, relatifs notamment à la survie des pilotes en milieu aquatique.
Plus loin dans le temps, l'armée suisse utilisait beaucoup plus intensément le site de tir fribourgeois, "jusqu'à 150 jours par année", a rappelé Bruno Locher. Aujourd'hui, le type d'exercice est limité au printemps, tirer dans le lac de Neuchâtel n'étant plus nécessairement évident.
Les milliers de tonnes de munitions qui gisent au fond du lac depuis les années 1930 alors que le site de Forel se trouve au milieu de la réserve naturelle de la Grande Cariçaie ont suscité de vives réactions l'été passé. Des députés fribourgeois ont notamment réagi en déposant un postulat à l'adresse du Conseil d'Etat.
iar avec ats et Clémence Vonlanthen
Intervention politique
Si l’armée a rectifié son tir, c’est que la pression politique, au niveau cantonal et national, s’est durci. "Ce magnifique lac n’est pas une décharge pour les tests de l’armée", s’agace Baptiste Hurni dans le 19h30.
Le Neuchâtelois, conseiller national socialiste, a déposé une interpellation à ce sujet lors de la dernière session parlementaire. "Il est temps que le débat puisse réellement avoir lieu. On a l’impression que parce que c’est l’armée, et surtout parce qu’on ne le voit pas, on se permet de ne rien faire."