Modifié

La pisciculture d'Estavayer-le-Lac, une "faillite collective" selon la Commission d'enquête

Une enquête fait la lumière sur l'échec de la pisciculture à Estavayer-le-Lac
Une enquête fait la lumière sur l'échec de la pisciculture à Estavayer-le-Lac / 12h45 / 2 min. / le 28 septembre 2021
La Commission d'enquête parlementaire (CEP) ad hoc porte un regard très sévère sur le projet de construction de la pisciculture d'Estavayer-le-Lac (FR). Inaugurée en 2016, elle avait cessé ses activités l'année suivante, en raison de défauts de construction.

La Commission juge "inexcusable l'incurie témoignée tant par le Conseil d'Etat que par les directions et acteurs concernés". Le gouvernement doit prendre les mesures qui s'imposent pour éviter la répétition d'une "telle déconvenue", soit une ardoise finale de près de 2,3 millions, a dit lundi à Granges-Paccot le député UDC Roland Mesot, président de la CEP.

Celle-ci a transmis son rapport au Grand Conseil afin que le plénum puisse en prendre acte en octobre.

Trente-trois séances

La CEP a tenu 33 séances plénières et auditionné douze personnes. Le document qui résulte de ce travail met en lumière une série de manquements dus à un défaut de structures dans la conduite et à des mauvais choix, a détaillé Roland Mesot. Par exemple, en 2012, une entreprise d'installations sanitaires a remplacé l'ingénieur du début. Un choix qui souligne "l'absence constante de spécialistes", a précisé le député.

>> Relire : Fribourg abandonne définitivement la pisciculture d'Estavayer

Une erreur a aussi été commise avec la décision de pomper l'eau du lac pour les bassins d'alevinage. Celle-ci contenait du sable et sa température était trop élevée. Roland Mesot a parlé d'un "désastre" sans cahier des charges. "Deux millions de francs, c'est quand même des sous pour le contribuable", a précisé le président de la CEP.

Redémarrage recommandé

A l'avenir, la Commission propose de renforcer le travail en amont afin d'établir le coût réel d'un investissement. Le chantier de la pisciculture d'Estavayer-le-Lac a nécessité une rallonge de 500'000 francs, soit un quart du crédit initial. "Il n'y a pas eu de malhonnêteté, mais une faillite collective", a relevé Roland Mesot.

Au-delà, la CEP recommande le redémarrage de l'installation. "Ou plutôt le démarrage", a noté le député du Centre Eric Collomb, son vice-président, "vu qu'elle n'a jamais servi". Le Conseil d'Etat avait évalué son coût à 1,5 million, privilégiant du coup d'investir la somme pour travailler avec la pisciculture de Colombier (NE).

Selon Eric Collomb, il faudrait un montant "net" d'un million pour une mise en service, surtout qu'un concordat intercantonal (avec Neuchâtel et Vaud) demande la présence d'une pisciculture sur la rive sud du lac de Neuchâtel. La CEP laisse à l'exécutif cantonal la liberté d'entreprendre les démarches en matière de responsabilité civile, pénale ou administrative.

ami avec fg/ats

Publié Modifié

Pas d'erreur grave, selon le gouvernement

De son côté, le Conseil d'Etat prend acte, mais tente de minimiser, en précisant que les conclusions de la CEP confirment ses propres analyses. Le gouvernement relève par ailleurs que les investigations font état de manquements et de négligences, mais qu'aucune erreur grave ou infraction n'a été constatée.

L'exécutif précise que la grande majorité des problématiques identifiées fait écho à des améliorations qui sont, pour la plupart, prêtes à être mises en oeuvre, si ce n'est pas déjà le cas. S’agissant de la remise en état de la pisciculture, des analyses complémentaires seront nécessaires, estime-t-il, le mandat et les travaux de la CEP n’ayant porté que sur la question des coûts.

Que le gouvernement botte en touche ne manque pas d'agacer certains membres de la Commission, qui estiment que les autorités font preuve d'une "mauvaise foi crasse". Roland Mesot et Eric Collomb ont regretté la réaction du Conseil d'Etat, le second se disant même "choqué". "Ces dernières années, les dépassements de crédit pour divers chantiers n'ont pas manqué", a insisté Eric Collomb, pour qui il est temps d'y pallier.