Catherine Esseiva (PVL) et Savio Michellod (PLR) ont déposé leur proposition le 31 octobre avec neuf cosignataires. Dans leur motion, les deux élus louent la flexibilité qu'apporterait une vitesse complémentaire de 40 km/h dans les zones de circulation principales. Elle permettrait une optimisation des projets, tout en conservant les aspects sécuritaires et environnementaux.
Interrogé dans La Matinale, le député libéral-radical Savio Michellod voit dans cette alternative du 40 km/h un "compromis comme on les aime bien en Suisse".
Effet sur les transports publics?
"Si l'on passe de 50 km/h à 30 km/h pour une ligne de bus qui traverserait par exemple une dizaine de localités, le temps de parcours pourrait être allongé de 5 à 7 minutes, ce qui serait problématique pour assurer les correspondances et pourrait pousser certaines communes à y renoncer", explique le syndic de Granges (Veveyse).
Concernant d'éventuels prolongements des trajets en bus, comme amené par les motionnaires fribourgeois, le directeur de Transitec, bureau d'étude spécialisé dans les problématiques de mobilité, Sylvain Guillaume-Gentil doute dans La Matinale que l'impact serait aussi important: "Dire qu'il y a des effets très importants et négatifs sur la vitesse commerciale des transports publics, il faudrait que ce soit prouvé. Même avec du 30 km/h autorisé, je pense qu'il faudrait plutôt parler de quelques secondes perdues, et pas de minutes. Ce petit effet pourrait aussi être balancé par des mesures d'accompagnement."
Depuis septembre 2021, la ville de Lausanne est passée au 30 km/h de nuit entre 22h00 et 06h00. Pour réduire l'impact sur les transports publics, la Municipalité a notamment décidé de mettre une partie des feux de signalisation en mode clignotant. "La circulation est un peu plus lente globalement, mais avec moins d'arrêts et d'à-coups. Comme il y a moins de circulation, nous avons des carrefours beaucoup plus fluides. L'un dans l'autre, on arrive à compenser en partie la diminution de la vitesse", explique Florence Germond, en charge de la mobilité.
"Un effet moindre"
Interrogé sur l'efficacité d'une limitation intermédiaire, Sylvain Guillaume-Gentil en doute. "La situation aujourd'hui avec une vitesse généralisée à 50 km/h, c'est que les gens ne roulent pas à 50 km/h, mais sont souvent en dessous de cette vitesse. Dans les zones 30, on voit que les gens ne respectent pas toujours la limite, donc réellement, la diminution est plus faible que les 20 km/h théoriques. Avec un 40 km/h, ce qu'on pourrait attendre, c'est un effet bien moindre, voire même très peu sensible", analyse-t-il sur la RTS.
Plusieurs communes ont réduit la vitesse à 30 km/h la nuit pour diminuer les nuisances liées au bruit. "Il y a un effet très notoire, souvent de plus de deux décibels, précise Sylvain Guillaume-Gentil. Aussi, entre 50 et 30 km/h, on multiplie par six la chance de survie d'un piéton qui se ferait heurter. On voit que les effets sont importants. La demi-mesure dans le cas du 40 km/h n'est pas forcément justifiée."
Sylvain Guillaume-Gentil relève également l'aspect légal d'un tel changement. "Il existe du 20, du 30 et du 50. Actuellement, le 40 km/h est considéré comme une exception. Cela signifie qu'il faudrait probablement changer la loi pour que la vitesse généralisée à 50 passe à 40. Ce n'est pas une petite mesure que l'on peut prendre dans une commune ou un canton. Là, on touche le droit fédéral."
Droite divisée
La proposition divise la droite fribourgeoise. Pour le député UDC Jean-Daniel Chardonnens, aussi directeur d'une entreprise de transport de passagers, il s'agirait d'une porte ouverte à une généralisation du 40 km/h.
"Tout dépendra des courants politiques qu'il y a dans ces villages. Plus ça partira à gauche, plus on risquera d'avoir ces limitations. C'est une entrave à la mobilité individuelle. Le fait de mettre une limitation à 40 km/h, c'est dire aux automobilistes 'Vous n'êtes pas les bienvenus'. Sur les routes de transit, le Canton devrait assurer le 50 km/h partout", réagit-il sur la RTS.
A Lausanne, le sujet clive toujours autant. En début d'année, le député PLR Maxime Meier a même déposé une pétition pour le maintien du 50 km/h en ville, de jour comme de nuit.
La motion fribourgeoise a été transférée au Conseil d'Etat, qui doit se prononcer d'ici au 21 mars 2023. Les autorités cantonales avaient annoncé cet été vouloir réduire à 30 km/h une vingtaine de kilomètres de routes pour réduire le bruit de la circulation routière.
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Muriel Ballaman et Léa Bucher
Adaptation web: Jérémie Favre