Pour Michel*, la justice est trop chère. Ce retraité a bénéficié de l’assistance judiciaire, mais il lui est impossible de rembourser l’argent avancé par l’Etat. "Mon revenu est de 2300 francs par mois. Quand il faut payer un loyer et les charges courantes, il faut se serrer la ceinture", a-t-il témoigné samedi dans le 19h30 de la RTS. "Alors, où aller chercher le surplus pour payer l'assistance judiciaire?"
Pour son avocat Pierre Mauron, il existe deux types de bénéficiaires de l’assistance judiciaire. Il y a d'abord les personnes en situation "d'indigence sur le long terme", qui ne perçoivent par exemple que l'AVS ou une rente invalidité.
Il y a ensuite celles qui sont touchées par "une pauvreté temporaire". "On ne gagne que très peu pendant trois ou cinq ans, on a des enfants en bas âge, une situation de vie différente. Mais on peut hériter, recevoir d'autres choses, gagner ou travailler plus", illustre l'homme de loi. "Là, il y aurait besoin de remboursement", soutient-il.
Pas assez de personnel pour encaisser
L'Etat fribourgeois ne récupère justement pas assez d’argent. En 2021, il a versé plus de 5,5 millions dans des procédures civiles, mais n’en a recouvré que 590'000.
Romain Collaud, le conseiller d’Etat en charge de la justice, pointe un "manque de moyens et de forces vives pour faire le suivi et l'analyse des dossiers et pour récupérer cet argent prêté lorsque les gens reviennent à meilleure fortune".
L'Etat vient d’engager à ce titre deux équivalents plein-temps. Mais ce n'est pas suffisant, selon Elias Moussa, député socialiste et membre de la Commission des finances et de gestion du Grand Conseil. "Il y a une marge de progression. D'autres cantons ont des chiffres plus élevés au niveau des frais qui sont récupérés", déclare l'élu.
Exemple vaudois
Le Canton de Vaud est un exemple en la matière. En 2021, il a déboursé 24 millions de francs. De cette somme, il a récupéré 16 millions, soit les deux tiers. Les bénéficiaires vaudois de l'aide ont en principe l'obligation de rembourser chaque mois entre 50 et 100 francs, et ce dès l’octroi de l’assistance judiciaire. C'est une manière de freiner certaines ardeurs procédurières.
"L'assistance judiciaire ne doit pas servir à multiplier les actions en justice. Le fait que la personne soit sensibilisée à cela la retiendra un peu", souligne Jean-Luc Schwaar, le directeur général des Affaires institutionnelles et des communes de l'Etat de Vaud. Les autorités fribourgeoises s'intéressent donc de très près au modèle d’encaissement vaudois.
md/ami
*Prénom d'emprunt