A la fin de la Seconde Guerre mondiale, la Suisse ne comptait pas moins de 6000 agriculteurs occupés à cultiver du tabac. Aujourd'hui, ils ne sont plus que 140, notamment dans la région intercantonale de la Broye (FR/VD), haut lieu de cette culture dans le pays.
Jusqu'à 2000 heures de travail par hectare
Au-delà des mises en garde pour la santé, cette baisse considérable s'explique essentiellement par des raisons logistiques. Cette plantation très exigeante demande beaucoup de temps et d'énergie. En été, il faut compter par exemple entre 1000 et 2000 heures de travail par hectare. Ramassage, triage et entreposage: tout est fait à la main. Des saisonniers viennent d'ailleurs souvent prêter main-forte aux agriculteurs durant la haute saison.
Le tabac, c’est beaucoup de travail. Donc l’été, on ne part jamais en vacances
Pour la famille Bonfils à Seiry (FR) - dans laquelle on est cultivateur d'herbe à Nicot de père en fils depuis des générations - cela faisait trop. Ils ont donc décidé de diminuer les plantations.
"Le tabac, c'est beaucoup de travail", confirme lundi dans l'émission Couleurs d'été Stéphan Bonfils, planteur de tabac comme l'a été avant lui son père, son grand-père et son arrière-grand-père. "Donc l'été, on ne part jamais en vacances. On part de temps en temps en automne ou au printemps. Mais l'été, avec mes enfants, mes parents et mes frères et sœurs, on a toujours été dans les hangars."
J’ai remarqué qu’en diminuant le tabac, j’ai plus de disponibilités pour des loisirs
Cette raison explique pourquoi son fils Jérémy, qui a repris l'exploitation familiale en 2019, a décidé de diminuer une partie des plantations de tabac pour se concentrer sur ses autres activités. "J'adore travailler, mais ça occupe beaucoup l'été. J'ai remarqué qu'en diminuant le tabac, j'ai plus de disponibilités pour des loisirs", explique-t-il notamment.
Prix fluctuants
Durant l'été, feuille après feuille, jour après jour, la récolte est testée et sélectionnée, avant d'être emballée pour être livrée au producteur SOTA à Payerne, société coopérative pour l'achat de tabac indigène. C'est là qu'un jury d'experts va fixer son prix d'achat.
Car en plus d'être chronophage, le tabac est une plantation dont la qualité de chaque récolte - et donc son prix - dépendra de nombreux facteurs, notamment de la météo. "Je ne dors pas très bien la nuit quand on va livrer", confesse Stéphan Bonfils.
Si, chez les Bonfils, on ne songe pas à arrêter, d'autres ont fait le choix de renoncer totalement à la production de tabac, à l'instar de David Pache. "On a dû prendre cette décision à cause d'une surcharge de travail. Il demande beaucoup de temps et beaucoup d'implication pour le chef d'exploitation", explique l'agriculteur de Prez-vers-Noréaz (FR).
Dans l'exploitation de Jérémy Bonfils, le travail continue. Le tabac va encore être livré au producteur jusqu'au début de l'année et ensuite, tout recommencera depuis le début.
Reportage TV de SRF adapté par Jost von Reding pour Couleurs d'été
Adaptation web: Fabien Grenon