"J’ai dormi dehors, j’ai fait des bêtises parce que je n’avais pas de solutions. Tu manges dehors, dors dehors, tu fais quoi ? Des bêtises pour gagner de l’argent. J’aimerais prendre un apprentissage ici, apprendre la langue, avoir une petite famille. Je veux rester ici."
Comme Adil*, un Algérien de 16 ans, ils sont nombreux à être arrivés à Genève sans parent, sans papiers, mais avec l'espoir d'une vie meilleure. En 2018, le service de protection des mineurs a recensé 86 mineurs non accompagnés. Ils sont pourtant invisibles auprès des institutions d’aide aux migrants car pas candidats à l'asile.
"Autorités démunies"
Pour ces jeunes, des garçons entre 15 et 18 ans principalement venus du Maghreb, pas d'école, pas ou peu de prise en charge sociale. Un hôtel sert d'hébergement à une dizaine d'entre eux, faute de mieux. Mais le gérant n’est pas formé à leur encadrement et les avis laissés sur un célèbre site de comparateurs d’hôtels relèvent le mauvais état général de l'établissement.
"Humainement ça m’inquiète", s'alarme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. "Je reconnais que les autorités sont totalement démunies. Mais en fait on se trouve face à des jeunes qui nous posent beaucoup de questions, qui pour la plupart ne cherchent pas à s’intégrer et ne restent que quelques jours."
Vers un nouveau lieu d'accueil
La socialiste souligne les liens fragiles entre le Canton et ces jeunes particulièrement vulnérables au parcours souvent fait d'errance. "Beaucoup de mineurs ont du mal à accepter des règles et ça met tous les services de l’Etat en alerte. Quelle est la bonne réponse à donner sachant que ces jeunes en déshérence, on doit leur donner une réponse?"
Depuis peu, l'Etat finance entièrement le programme d'accueil des MNA de l'association Païdos, qui aide les jeunes en difficulté à Genève. A raison de trois heures par jour, cinq jours par semaine, le programme offre un début de prise en charge. Pour Nicolas Liengme, pédopsychiatre, ce n'est pas suffisant. "Je ne connais pas de situations d’enfants et d'ados qui ont eu un parcours aussi défavorable qu’eux. Il faut pouvoir les soigner, il faut s'investir pour eux, et de façon massive."
Le Conseil d’Etat plancherait sur un nouveau lieu d’hébergement pour les mineurs non accompagnés. Reste aussi à encadrer ceux qui souhaitent rester en Suisse, comme Adil.
Flore Amos/ani
* Prénom d'emprunt, nom connu de la rédaction