Modifié

Pétition des coursiers genevois d'Uber pour le maintien de leurs emplois

Le conseiller d'Etat Mauro Poggia lors d'une conférence de presse. [Keystone - Martial Trezzini]
Mauro Poggia répond à une pétition des employés d'Uber sur les réseaux sociaux / Forum / 8 min. / le 24 juillet 2019
Le texte, lancé il y a moins d'une semaine, a déjà recueilli près de 400 paraphes. Il s'adresse directement à Mauro Poggia. Le conseiller d'Etat chargé de l'emploi a eu effectivement des mots assez durs envers la plateforme américaine.

En février dernier, à l'époque où il reprenait en mains le dossier mené auparavant par Pierre Maudet, Mauro Poggia avait comparé Uber et Uber Eats aux invasions barbares.

Le conseiller d'Etat MCG avait alors sifflé la fin de la récréation, estimant que la société américaine devait désormais se conformer aux règles. A défaut, la firme se risquerait à une interdiction de pratiquer. Il n'en fallait pas plus pour affoler les coursiers de l'entreprise américaine.

La pétition appelle les autorités genevoises à respecter le désir d'indépendance des travailleurs d'Uber et Uber Eats, et à préserver leur possibilité de travailler de manière flexible.

Elle rappelle aussi les menaces proférées par Mauro Poggia. "Au lieu de soutenir les indépendants et les entreprises locales à Genève, écrivent les pétitionnaires, cela va priver des milliers de chauffeurs, coursiers et entrepreneurs de leur accès au travail et à une rémunération, et mettre en danger notre liberté et nos opportunités professionnelles."

Le magistrat est donc appelé à continuer de travailler avec Uber "de la manière, disent les pétitionnaires, dont nous le voulons."

Réponse immédiate

Mauro Poggia a répondu directement aux signataires par l'intermédiaire d'une vidéo sur Facebook.

La démarche étonne pour deux raisons: la première parce que la pétition n'avait jamais été rendue publique jusque-là. Mauro Poggia l'a donc révélée avec le risque d'un effet boomerang puisque sa politique y est contestée.

La seconde surprise provient de la manière de répondre à une préoccupation sociale. Le conseiller d'Etat MCG aurait pu écrire au premier signataire ou aux avocats d'Uber pour calmer la situation. Il a toutefois préféré passer par les réseaux sociaux.

Rassurer

Avec près de 400 signatures, Mauro Poggia a senti qu'il fallait rassurer. C'est ce que le magistrat s'emploie à faire dès le départ en rappelant qu'il n'est pas question de "dissuader quiconque de poursuivre une activité lucrative".

Mais le conseiller d'Etat ne badine pas avec les règles: les travailleurs d'Uber et d'Uber Eats pourront continuer à oeuvrer à Genève moyennant le respect des lois suisses et des conventions collectives de travail, telles que la couverture sociale pour apporter un minimum de protection. Au final, sa position n'a pas bougé d'un iota.

"Un acte de propagande"

Interrogé dans Forum sur cette affaire, Mauro Poggia porte toutefois un regard saignant sur cette pétition qu'il estime être un "acte de propagande des sociétés Uber, qui part diffusion de la crainte et de la peur, essaient de mobiliser les chauffeurs. Ils sont manipulés lorsqu'on leur dit que l'on va fermer Uber".

L'édile attend dès lors une compréhension de la part des signataires. "Il faut qu'ils entendent que l'action de l'Etat est en leur faveur. Dans les conditions actuelles, ils peuvent, du jour au lendemain, se retrouver sans travail et sans revenu".

Le conseiller d'Etat rappelle encore que Uber considère les livreurs et coursiers comme des indépendants. "La grande majorité de ces travailleurs n'ont aucune couverture sociale, et c'est bien là où il faut intervenir quand on est représentant de la collectivité. Il n'est pas question de laisser la précarisation de l'emploi se diffuser".

>> Ecouter aussi le débat entre Vincent Maître, avocat de certains chauffeurs, et Umberto Bandiera, secrétaire syndical d'Unia Genève :

Vincent Maître, député PDC et avocat de certains chauffeurs, et Umberto Bandiera, secrétaire syndical d'Unia Genève. [Keystone - Salvatore Di Nolfi et Martial Trezzini]Keystone - Salvatore Di Nolfi et Martial Trezzini
Mauro Poggia maintient la pression sur Uber à Genève, malgré une pétition lancée par les chauffeurs / Forum / 8 min. / le 25 juillet 2019

Raphaël Leroy

Adaptation web: Jérémie Favre

Publié Modifié

Ouvert à l'innovation

Mauro Poggia a aussi tenu à rappeler que le canton est ouvert aux personnes souhaitant apporter de nouveaux modèles économiques à Genève.

"Il faut toutefois que cette innovation respecte ce qui a été construit, parfois difficilement, ces dernières décennies dans notre pays, c'est-à-dire des règles minimales qui protègent ceux qui travaillent chez nous, avec des couvertures sociales, mais qui protègent aussi les entreprises activent sur notre territoire contre une concurrence déloyale, précisément parce que les règles d'activités ne seraient pas les mêmes", conclut le conseiller d'Etat.