La Cour des comptes (CdC) genevoise a évalué la pertinence et l’efficacité du plan d’action contre le (cyber)harcèlement scolaire lancé en 2016 par le Département genevois de l’instruction publique, de la formation et de la jeunesse (DIP).
Ce programme, qui prendra fin en juin prochain, est jugé globalement positif par le gendarme du secteur public dans ses conclusions présentées mardi.
La CdC salue les efforts déployés par certaines écoles pour faire face au harcèlement, et souligne les effets bénéfiques d'avoir des professionnels sensibilisés et formés à la thématique.
Elle estime toutefois qu'ils devraient être plus nombreux -seule une moitié des enseignants a bénéficié du programme- et déplore de grandes disparités entre établissements scolaires, qui entraînent une inégalité des chances pour les élèves.
D'une manière générale, l'organe de contrôle relève des difficultés persistantes, que ce soit à l'échelon des écoles ou des instances publiques. Six recommandations d'amélioration autour de quatre axes sont proposées.
Renforcer la formation des enseignants
La CdC juge en particulier nécessaire de renforcer la formation des enseignants en matière de prévention, de repérage et de prise en charge des cas de harcèlement.
Il serait souhaitable, estime-t-elle, qu'ils intègrent davantage des compétences psychosociales telles que le respect, l'empathie ou la bienveillance dans leur enseignement, et apprennent à mieux gérer les comportements problématiques pour préserver le climat en classe.
L’évaluation déplore les lacunes des enseignants concernant les nouvelles technologies et les réseaux sociaux, qui sont pourtant des "amplificateurs" de harcèlement (voir encadré).
Et en termes de repérage, les professionnels auraient tendance à trop attendre avant d’oser qualifier une situation suspecte de harcèlement, impliquant une aggravation de la souffrance des victimes.
Améliorer le monitoring
Par ailleurs, la Cour des comptes pointe des failles dans la communication et la coordination entre les différents acteurs. Il serait nécessaire d’harmoniser les pratiques et de clairement définir quelles informations doivent être remontées, par exemple entre la direction de l'école et les enseignants, ou entre l'école et les parents.
Enfin, pour améliorer la mise en oeuvre de cette politique publique, il est préconisé de définir une autorité qui serait chargée de centraliser les données émanant des différents établissements.
Une telle démarche permettrait de mieux mesurer l’ampleur du phénomène et d’adapter les actions de prévention des établissements, selon le rapport d'évaluation. L’ensemble des recommandations de la Cour des comptes a été accepté par le DIP qui s’est engagé à les réaliser d’ici août 2022.
Pauline Turuban
Entre 5% et 10% des jeunes seraient touchés
Le harcèlement scolaire est une forme de violence (physique, verbale ou psychologique) répétée et intentionnelle, perpétrée par un élève ou un groupe d’élèves à l’encontre d’un autre élève, qui n’a pas les capacités de se défendre. Ce problème toucherait 5 à 10% des jeunes entre 4 et 16 ans.
La moitié des cas de harcèlement se poursuivent sur les réseaux sociaux, dont les caractéristiques propres (vitesse de diffusion, audience, durabilité des éléments postés sur les réseaux sociaux, 24h/24h) contribuent à amplifier le phénomène.