Il y a un an, le gouvernement genevois avait pris position sur les conclusions de la commission d'enquête parlementaire chargée de faire la lumière sur les dysfonctionnements ayant conduit à l'assassinat de la sociothérapeute Adeline M. en 2013.
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En désaccord sur plusieurs points avec la réponse du Conseil d'Etat, les membres de la commission de contrôle de gestion (CCG) du Grand Conseil ont rejeté à l'unanimité le rapport du gouvernement. Et ont convoqué lundi une conférence de presse pour présenter leurs propres recommandations sur le sujet.
Premier point de divergence entre l'exécutif et la CCG: la sociothérapie. Ce traitement visant à réinsérer les détenus avait été suspendu par les autorités dans la foulée de l'affaire Adeline. La commission le déplore; elle rappelle "qu’une peine de prison doit aboutir à un réel projet de réinsertion" et que la sociothérapie en est "la pierre angulaire".
Pour les auteurs du rapport, il y a un "manque de volonté" de la part de l'exécutif de rétablir la sociothérapie. Pourtant "c'est une urgence, il faut que ce soit fait en priorité", a déclaré dans le 12h30 le député Bertrand Buchs, membre de la commission de gestion.
Dysfonctionnements à Curabilis
La commission pointe par ailleurs une série de dysfonctionnements au sein de Curabilis, la prison concordataire pour détenus dangereux. Le rapport parle d'un "manque de gouvernance", d'un "flou concernant les responsabilités" et d'une "absence de réflexion sur le devenir des détenus".
Les députés s'alarment des conditions de travail des agents pénitentiaires: "accumulation de stress", absentéisme très élevé, "manque de soutien et de formation"... En découlerait une mise en danger des gardiens.
La CCG s'inquiète en particulier qu'une formation dédiée à la prise en charge de détenus atteints de troubles psychiatriques ait été suspendue. Il est impératif que tous les agents pénitentiaires suivent cette formation, selon la commission. Celle-ci insiste en outre sur la nécessité que les agents de détention interviennent systématiquement en binôme, alors qu'actuellement ils sont souvent seuls à intervenir en cas d'urgence.
Pour Bertrand Buchs, "un risque existe" que la situation ayant abouti à la mort d'Adeline M. "se retrouve au niveau de la prison de Curabilis". "Il faut complètement revoir la prise en charge de Curabilis, se donner les moyens d'avoir plus de personnel (...) et il faut une surveillance", a souligné le député.
Déperdition d'informations
Dans ses conclusions, la commission fait encore état de failles au niveau de la circulation des informations sur la dangerosité des détenus. L’avis du personnel de terrain n'est pas assez pris en compte dans l’évaluation de la dangerosité et cela doit changer, d'après le rapport.
Les députés à l'origine du document demandent enfin la mise sur pied d'une structure psycho-sociale destinée à aider le personnel pénitentiaire, ainsi qu'une révision de la loi cantonale sur la violence domestique afin d'intégrer la gestion des menaces.
Pauline Turuban