Après la Deuxième Guerre mondiale, déverser des munitions dans des lacs suisses était une pratique sinon courante, du moins autorisée. A Genève, dans le Léman, c'est une entreprise privée qui l'avait fait.
Or, en septembre dernier, l'organisation environnementale Odysseus 3.1 a voulu en savoir plus. Elle a envoyé des plongeurs pour scruter le fond du Léman. Les résultats ont été présentés aux médias ce vendredi: quatre caisses de munitions ont été découvertes, posées au fond du lac, et non enfouies sous les sédiments, et ce à une cinquantaine de mètres de profondeur.
Nettoyer le lac
Ces découvertes n'ont pas vraiment surpris Lionel Rard, plongeur et président d’Odysseus 3.1, qui appelle les autorités à agir: "Plonger pour faire du sensationnel, ça n'est pas le but", assure-t-il.
"Ce que nous souhaitons, c'est que des actions soient mises en place par les autorités tout simplement pour nettoyer le lac. On n'est pas là pour juger ce qui a été fait par le passé, il y a cinquante ou soixante ans. En revanche, ceux qui ont maintenant la connaissance de ce qui se passe et qui ont les moyens d'intervenir, seront jugés par les générations futures et par nous-mêmes", estime le président de l'association.
Pour Stéphanie Girardclos, spécialiste des sédiments interrogée dans le 19h30, le fait que ces caisses ne soient pas dans du sédiment "change énormément leur dangerosité. Dans les munitions il peut y avoir arsenic, cyanure, produits cancérigènes associé à des explosifs. Et on n’a pas envie d’avoir ça dans l’eau potable ou pour la faune aquatique."
Question urgente
Plongeurs, politiciens, scientifiques, tous dénoncent aujourd’hui la légèreté des autorités dans ce dossier.
La députée socialiste Salima Moyard avait déjà relayé cette inquiétude au Grand Conseil genevois en 2017, via une question écrite. Les autorités se montraient alors rassurantes. Mais Salima Moyard veut revenir à la charge: "Il y a des risques de pollution de l'eau, étant donné qu'il y a des prises d'eau, c'est l'essentiel de l'eau potable dans tout le bassin genevois. On ne peut pas simplement dire que ce n'est pas un problème, il y a également des conduites de fibre optique, des gazoducs, on parle même de la traversée du lac par tunnel, c'est donc un problème de sécurité publique", assène-t-elle.
Salima Moyard a donc déposé jeudi une nouvelle question urgente au Grand Conseil. Le Conseil d'Etat y répondra en décembre, lors de la prochaine session.
Toujours pas d'inquiétude particulière à l'Etat
Dans une interview à la RTS, le directeur général de l'Office de l'eau du canton de Genève, Gilles Mulhauser, ne se montre pas particulièrement inquiet: "A notre avis", souligne-t-il, "il n'y a pas de pollution majeure dans les environs de ces munitions."
Mais ce responsable reconnaît cependant qu'il y a une situation nouvelle avec ces munitions qui sont désormais hors sédiments. "Et là, on se doit de réagir", dit-il. "Mais (...) il va falloir qu'on analyse cette situation et voir dans quelle mesure on doit commander des travaux ou des actions particulières."
Guillaume Rey/pym