"Les images des files d'attente ont bouleversé l'opinion publique en Suisse et à l'étranger", a relevé samedi devant les médias le conseiller d'Etat Thierry Apothéloz, en charge du Département de la cohésion sociale (DCS). L'occasion de tirer un bilan de l'opération avec la Ville de Genève et ses partenaires, mais aussi de présenter l'évolution de l'aide liée à la crise due au nouveau coronavirus.
En six samedis, 15'967 colis ont été distribués, soit 207 tonnes de denrées alimentaires de base et de produits d'hygiène, a fait savoir la Ville de Genève, qui a coordonné ces distributions depuis le 2 mai. Le nombre de personnes inscrites pour recevoir des bons d'achat des Colis du Cœur a triplé pour atteindre 14'030 personnes samedi. La Ville de Genève a aussi tenu des stands d'information sociale.
Sans-papiers
"La politique migratoire restrictive de la Suisse engendre ces situations", a relevé la nouvelle conseillère administrative de la Ville de Genève Christina Kitsos, en charge de la Cohésion sociale et de la Solidarité depuis lundi. Compte tenu du risque de perdre leur permis, même les étrangers disposant d'un statut légal n'osent pas faire appel à l'aide sociale, a-t-elle souligné.
Samedi, en marge de la distribution, une dizaine de personnes ont manifesté, demandant leur "régularisation sans condition". Afin de donner un visage à la question des sans-papiers, Thierry Apothéloz a invité Karin Keller-Sutter à venir aux Vernets, a-t-il indiqué. La conseillère fédérale en charge du Département de justice et police n'a, à ce jour, pas répondu à l'invitation.
Le magistrat a aussi rappelé samedi la responsabilité de certains employeurs qui ont privé leurs employés de revenu du jour au lendemain à cause de la crise sanitaire. "Cette situation doit être dénoncée", a-t-il déclaré, annonçant le lancement d'une campagne à ce sujet.
Insécurité alimentaire
Le profil des bénéficiaires aux Vernets a évolué au fil des distributions hebdomadaires, selon Yves Jackson, responsable de la Consultation ambulatoire mobile de soins communautaires des Hôpitaux universitaires de Genève. Aux personnes dans une précarité extrême se sont peu à peu ajouté celles qui n'avaient plus d'autre choix, ayant épuisé leurs économies.
Pour le médecin, la pandémie de Covid-19 a joué un rôle d'accélérateur d'une crise majeure. Aux Vernets, les HUG se sont retrouvés face à des personnes qui avaient renoncé à se soigner et qui avaient un besoin urgent de médicaments. Samedi, ils ont mené une enquête sur l'insécurité alimentaire dans les familles.
Distribution de proximité
Dès la mi-juin et pour trois mois, les communes s'occuperont de distribuer des biens de première nécessité. La Ville de Genève comptera deux sites, tandis que Versoix et le Grand-Saconnex, avec d'autres communes, prévoient un lieu pour les habitants de la rive droite. Vernier va aussi en ouvrir un. Thierry Apothéloz compte sur l'effet boule de neige pour que d'autres communes reprennent le flambeau.
La banque alimentaire Fondation Partage coordonnera les dons. Le canton a signé un protocole d'accord avec les filiales genevoises de Coop, Denner, Lidl et Migros, afin de permettre aux particuliers de laisser des marchandises directement dans les magasins, jusqu'au 11 juillet. Les dons proviendront aussi des actions "Caddie pour tous" de la Radio Télévision Suisse et "Samedi du partage", qui a lieu en ligne.
"Lorsque l'urgence disparaîtra, nous présenterons en automne un plan cantonal de lutte contre la précarité", a fait savoir Thierry Apothéloz. D'ici là, le canton et les associations vont continuer à essayer de trouver des solutions, notamment en matière de logement. "Cette question est de plus en plus forte pour les personnes sans revenu", a-t-il souligné.
ats/sjaq