C'est un véritable casse-tête auquel doivent faire face les polices genevoises et neuchâteloises. Depuis plusieurs mois maintenant, elles sont confrontées, à l'instar du canton de Vaud et d'autres villes d'Europe, à une hausse marquée de la criminalité de rue. Vols à la tire ou à l'arraché, larcins dans les magasins, les voitures ou à la plage, agressions sur la voie publique: les infractions sont multiples et nombreuses. A Neuchâtel, ces vols représentent même 80% de tous les vols du canton. Du jamais vu.
Ces infractions inquiètent fortement les riverains. C'est vrai dans le littoral neuchâtelois comme dans le quartier des Grottes, à Genève, notamment. Ses habitants ont d'ailleurs interpellé le mois dernier les autorités cantonales et municipales. Pour faire face à ce phénomène récurrent, les forces de l'ordre des deux cantons romands se sont réorganisées quasiment au même moment.
Multiplication des patrouilles
Le 1er juillet, la police genevoise a mis sur pied une nouvelle entité: le Groupe vols et agressions de rue, le GVAR. Il rassemble six inspecteurs de la police judiciaire pour une durée de 3 mois, "reconductible selon l'évolution de la situation", précise Jean-Philippe Brandt, le porte-parole genevois. Presqu'en même temps, la police neuchâteloise a créé une Task force dédiée spécifiquement à cette criminalité de rue, appelée "Litto" comme littoral.
Toutes deux ont pour mission notamment de collecter et d'exploiter des renseignements, de multiplier les patrouilles, de coordonner des opérations et de servir d'interface à différents services de l'Etat. A Neuchâtel, des dénonciations immédiates ont déjà eu lieu, de même que des interpellations en flagrant délit. Des interdictions de périmètres ont été appliquées.
Mineurs non accompagnés
L'urgence et l'ampleur, inédite à Neuchâtel, de la situation expliquent la mise en place de ces entités dédiées. Mais le profil des auteurs de ces délits n’y est pas étranger non plus. La grande majorité des délinquants sont des ressortissants d'Afrique du Nord. Des personnes en errance, séjournant souvent illégalement en Suisse. Dont un certain nombre de mineurs non-accompagnés (MNA).
"Les services de police ont constaté que plusieurs MNA ont été mis à disposition du Tribunal des mineurs pour des faits de délinquance de voie-publique, à savoir notamment des vols avec ou sans violence, voire dans des domiciles par introduction furtive ou par effraction, précise Jean-Philippe Brandt, de la police genevoise. Il a été constaté que cette délinquance agit par opportunité, sans avoir un mode opératoire spécifique."
Les MNA sont un sujet brûlant à Genève. Depuis plusieurs mois, des collectifs se battent pour tenter d’améliorer leurs conditions d’hébergement et leur prise en charge. Fin avril, ils ont écrit au Conseil d’Etat à ce sujet.
Des profils problématiques
Le profil de ces délinquants, majeurs comme mineurs, complique le travail des forces de l'ordre et de la justice. Surtout que certains tentent de brouiller les pistes en se faisant passer pour des requérants d'asile ou des mineurs. "Notre Task force a d’ailleurs permis de montrer que certains mineurs n’en étaient pas", indique Daniel Favre, chargé de la prévention de la criminalité à la police neuchâteloise.
Ces personnes n'ont bien souvent aucune pièce d'identité sur elles, elles sont pour la plupart inéligibles au renvoi dans leur pays, et les plus jeunes bénéficient de la justice des mineurs, basée sur l'éducation plutôt que la répression. Résultat: le problème perdure et le sentiment d'impunité règne. Genève et Neuchâtel ont donc décidé d’y mettre un terme.
Raphaël Leroy