Décision de l'AIEP: l’Autorité indépendante d’examen des plaintes en matière de radio - télévision (l’AIEP) a admis une plainte pour ce sujet diffusé dans les émissions La Matinale et le 12h45 du 15 décembre 2020. Dans sa décision, l’AIEP a estimé que ce sujet ne respectait pas le principe de la présentation fidèle des événements visant la libre formation de l’opinion du public. Le détail de la décision de l'AIEP
Pierre Maudet visite de nuit les locaux de son ancien département du développement économique (DDE) situés en Vieille-Ville de Genève, a appris la RTS. Le conseiller d'Etat s'est rendu régulièrement dans son ex-bureau ces dernières semaines sans que le gouvernement cantonal n'en soit informé.
Une fois au moins, la visite surprise du magistrat indépendant a été immortalisée par des images de vidéosurveillance. Un dispositif que Pierre Maudet a lui-même mis en place, il y a près de quatre ans.
"Pas de fréquentation des bureaux"
L’élu n’est pas supposé se rendre dans ses anciens locaux, qui plus est sans avertissement préalable. Ce qu’il conteste fermement. "Il n’a jamais été question d’interdiction de me rendre à mon bureau, assure-t-il à la RTS. Ni le 28 octobre, ni en novembre, ni mercredi passé ni même aujourd’hui."
Le 28 octobre justement, un rapport accablant sur sa gestion de son département demandait au Conseil d’Etat de protéger rapidement les collaborateurs du DDE en les éloignant de Pierre Maudet. Résultat: ce dernier a été déchu de son dicastère et décision formelle a été prise de le déplacer dans un autre bâtiment, sis à la Jonction.
Le magistrat a pu se rendre le jour même dans son bureau pour récupérer ses affaires. Il a pris l'engagement formel auprès de l'Exécutif de ne plus entrer en contact avec ses anciens employés. "Partant, il n'y a pas de fréquentation des bureaux en question", affirmait-il à ce moment-là devant la presse. Pierre Maudet a toutefois pu garder son passe, des clés qui ouvrent plusieurs portes de l’édifice abritant le DDE et le département des finances (DF). C'est avec celui-ci qu'il a réalisé ses visites.
Dimanche soir et tôt le matin
Le conseiller d'Etat genevois n'ayant plus de prérogatives, que vient-il faire dans ses anciens locaux? Pourquoi s'y rend-il régulièrement alors que l'enquête sur le fonctionnement du DDE est toujours en cours? Sur questions de la RTS, il confirme ses incursions qu'il réalise "le dimanche soir ou tôt le matin". De sorte à ne pas entrer en contact avec ses ex-employés. Or, selon les informations de la RTS, Pierre Maudet serait déjà tombé sur un ou plusieurs collaborateurs lors de ses visites.
Ses explications restent évasives quant au but précis de ses escapades. "Jamais le Conseil d'Etat ne m'a demandé de vider mon bureau ou de rendre mes clefs et mon badge", explique-t-il. "Pour le surplus, je dispose d'une petite salle de réunion à la Jonction, sans téléphone ni ordinateur, avec un fort passage; on ne peut guère parler de bureau."
Changement de serrures
Il y a dix jours, la nouvelle responsable du DDE, Nathalie Fontanet, a ordonné de changer les serrures du bâtiment accueillant le DDE et le DF, comme le révélait Léman bleu la semaine passée. Elle ne fait pas de commentaires aujourd'hui. Pierre Maudet, lui, ne comprend pas.
"J'ai précisément de la peine à le comprendre dès lors que cela intervient plus de cinq semaines après la décision du 28 octobre et alors que mon secrétariat général connaît mon usage du bureau", indique-t-il.
Une demi-douzaine de cylindres ont été remplacés pour éviter des accès qui n’ont pas lieu d’être. Il semblerait cependant que cela n’ait pas suffi à mettre un terme aux visites nocturnes.
Raphaël Leroy
Des réactions entre consternation et amusement
Le président du PLR genevois, par exemple, se demande pour quelle raison Pierre Maudet visite son ancien bureau. Bertrand Reich estime que cette histoire montre que le magistrat indépendant est dans le déni: il n'accepte pas la décision du Conseil d'Etat, validée par la justice, souligne-t-il, de lui retirer son dicastère.
Le député MCG François Baertschi trouve cette histoire "pathétique", c'est le terme employé. Il peine à comprendre pourquoi Pierre Maudet n'a pas réussi à s'entendre avec sa collègue Nathalie Fontanet pour qu'il puisse se rendre dans ses anciens locaux. Lui aussi se demande ce qu'il va y faire. "Peut-être souhaite-t-il mener campagne depuis son bureau", ironise-t-il en référence à sa candidature à l'élection partielle du 7 mars.
Mêmes réactions à gauche
La présidente des Verts genevois estime qu'il s'agit d'un nouvel épisode des affaires qui poursuivent Pierre Maudet depuis de nombreux mois. Delphine Klopfenstein-Broggini regrette qu'à chaque apparition médiatique du conseiller d'Etat, il n'évoque que cela et pas les thèmes de fond.
Le député d'Ensemble à gauche Pierre Vanek, lui, rit de bon coeur. Il juge que cette histoire relève du Grand Guignol. Il se demande aussi pourquoi le Conseil d'Etat a laissé les clés de son bureau à Pierre Maudet.
Sur les réseaux sociaux, les partisans du magistrat lui maintiennent leur soutien. Ils assurent que ce dernier n'avait pas d'interdiction formelle de se rendre dans ses anciens locaux.