L'affaire jugée par le Tribunal de police a fait grand bruit et pourrit la vie politique genevoise depuis 2018. Pierre Maudet, qui a dans un premier temps menti sur le financement de ce séjour aux Emirats, avant de faire repentance, a vu sa cote chuter et ses soutiens fondre à mesure que l'enquête de la justice avançait.
Aujourd'hui, Pierre Maudet se retrouve sans parti, le PLR l'ayant exclu de ses rangs. Il est aussi privé de son département par ses collègues de l'exécutif. Mais le politicien garde de la ressource. "Il affronte cette dernière étape avec la volonté intacte de faire établir son innocence", relève son avocat Grégoire Mangeat.
Séjour à Abu Dhabi
Selon l'acte d'accusation, la valeur du voyage effectué par Pierre Maudet et ses proches à Abu Dhabi, en 2015, est estimée à plus de 50'000 francs. Les hôtes du prince héritier Mohamed Bin Zayed Al Nahyan ont dormi dans un 5 étoiles et ont été aux premières loges pour suivre un Grand Prix de Formule 1.
Le programme sur place était principalement "hôtel, piscine, cigares et Grand Prix", relève le Ministère public genevois. Ce dernier a enquêté pour savoir qui était derrière l'organisation d'un tel séjour. Le Parquet souligne en effet que Pierre Maudet n'avait aucun contact sur place, aux Emirats.
C'est dans ce contexte qu'interviennent un directeur d'entreprise et un entrepreneur, tous deux amis du conseiller d'Etat. Eux ont les relations que le magistrat n'a pas. Ils mettent donc sur pied le voyage. Ces deux hommes se retrouvent également avec Pierre Maudet sur le banc des accusés. Ils devront répondre d'octroi d'un avantage.
Financement d'un sondage
L'homme d'affaires et le directeur seront aussi jugés pour avoir financé, à hauteur de 34'000 francs, un sondage sur les préoccupations des Genevois devant servir aux intérêts du conseiller d'Etat. Dans ce volet de l'affaire, Pierre Maudet est également jugé pour avoir approuvé ce financement.
Que ce soit pour le voyage à Abu Dhabi ou pour le sondage, le Ministère public estime que Pierre Maudet a accepté des avantages (lire encadré), en sa qualité de membre d'une autorité, "en s'accommodant du risque" que ces avantages lui soient octroyés avec le but "de l'influencer dans l'exercice de ses fonctions officielles".
ats/vajo
La jurisprudence en matière d'acceptation d'un avantage
Dans ce procès, Pierre Maudet joue gros. Le conseiller d'Etat, démissionnaire du gouvernement genevois, est candidat à sa propre succession. Le premier tour de l'élection complémentaire se déroule le 7 mars. D'ici là, le Tribunal de police aura probablement rendu son verdict.
>> Relire : Huit candidats pour l'élection complémentaire au Conseil d'Etat genevois
La jurisprudence en matière d'acceptation d'un avantage est mince. Au cours des quinze dernières années, la justice a eu toutefois à trancher quelques affaires. En Suisse romande, la plus retentissante est celle de Jean-Claude Doriot.
L'ancien municipal socialiste de Montreux s'était vu infliger une peine de 15 mois de détention avec sursis, assortie de 125'000 francs de compensation à l’Etat de Vaud. Son tort? Avoir accepté un prêt de la part d’un ami architecte à qui il avait accordé la vente, contre l'avis de ses services, d'un important domaine communal.