Depuis 2005, les étrangers vivant en Suisse depuis huit ans ont le droit de vote au plan communal à Genève. Une étude universitaire, réalisée à la demande du Bureau de l'intégration des étrangers et du Département de la Cohésion sociale, confirme que le taux de participation reste bas dans certaines communautés, notamment espagnoles et portugaises.
À chaque scrutin, la différence de la participation entre étrangers et Suisses est d'environ 15 points. Lors des élections municipales du 15 mars 2020, le taux de participation des Suisses était de 40,2%, contre 23,2% pour les étrangers.
Le rapport révèle de grandes disparités entre les communautés : une participation de 12,9% pour les Portugais à 40,6% pour les Belges ou 39,1% pour les Allemands. Il en ressort également que deux tiers de la communauté portugaise et plus de la moitié des Espagnols n'ont jamais utilisé leur droit de vote lors des six élections communales des treize dernières années.
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Habitude démocratique
L'étude met en avant les facteurs pouvant influencer le taux de participation: un niveau de formation moins élevé, un revenu moindre, l'âge moyen et l'importance du projet de retour au pays. Les trois premiers critères valent également pour les citoyens suisses qui pratiquent le plus l'absentéisme.
Pour Thierry Apothéloz, conseiller d'Etat en charge de la cohésion, d'autres facteurs subsistent. "Nous faisons appel à eux seulement lors des élections communales, qui ont lieu tous les cinq ans. Il n'y a pas de pratique régulière et il est facile de perdre son habitude démocratique."
Il ajoute : "Il y a aussi une stagnation de la participation de la part des citoyens suisses. Dans l'ensemble, il est inquiétant de constater que peu de personnes participent aux élections dans une démocratie".
Dès lors, comment sensibiliser les différentes communautés à aller voter? Certaines initiatives voient le jour au sein même des collectivités, comme à la radio Arremesso, antenne genevoise adressée aux Portugais vivant en Suisse.
"La première génération a vécu dans une dictature et n'a pas l'habitude d'exercer son droit démocratique. C'est vrai qu'on est encore dans un ghetto culturel, mais on essaye de s'ouvrir davantage", explique Ilidio Morgado, animateur à Arremesso.
"Sur nos ondes, on encourage nos auditeurs à éveiller leurs consciences politiques et à aller voter. Nous avons beaucoup à donner à la société civile, sans compter que nous sommes une force économique et politique majeure", ajoute-t-il.
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Réveil politique
Certains n'hésite pas à s'engager sur la voie politique. C'est le cas de Bruno Da Silva, élu cette année au Conseil administratif de la commune de Thônex. Sa prise de conscience s'opère après 2010. "Avec l'initiative de l'UDC sur le renvoi automatique des criminels étrangers c'est devenu très concret. Je me suis rendu compte que je pouvais partir à tout moment si je commettais une infraction, même si j'avais toujours vécu en Suisse. Suite à cela je me suis naturalisé pour marquer mon attachement à la société genevoise."
Pour lui, un véritable travail de fond est à entamer de la part des politiques. "Les élus doivent aller à la rencontre des communautés, travailler sur le lien social et investir les quartiers. On attend des étrangers qu'ils soient investis quand cela arrange, sans vraiment les intégrer pleinement à la société", conclut-il.
Sujet TV: Mathieu Lombard
Adaptation web: Sarah Jelassi