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Des centaines d'appartements sur Airbnb échappent au marché locatif à Genève

Une capture d'écran d'une recherche sur Genève sur le site Airbnb. [Airbnb - DR]
Des centaines d’appartements soustraits au marché immobilier genevois sur Airbnb / Forum / 2 min. / le 5 août 2021
Dégoter un appartement à Genève est un véritable chemin de croix. La ville fait face à une pénurie de logements depuis des décennies. Or, des milliers de biens sont proposés aux touristes via Airbnb. Ils sont soustraits à un marché locatif déjà agonisant.

A Genève, le taux de vacance est de 0,49%. Autrement dit, sur 1000 logements, seulement 5 sont en attente d'un locataire. Autant dire que pour décrocher le graal, il vous faudra beaucoup de patience, de la chance ou un bon piston. L'autre solution se trouve sur Airbnb. La plateforme de location entre particuliers, elle, ne connaît pas la crise. 2098 biens y sont disponibles et 715 logements sont proposés en entier et à l'année, selon les données récoltées par la plate-forme Inside Airbnb.

Des appartements vides

En regardant les belles photos sur le site, on s’aperçoit vite que ces appartements sont bien trop dépouillés pour être habités. Difficile de croire qu'il s'agit d'un jeune étudiant qui loue son studio les week-ends quand, par exemple, il rentre chez ses parents.

>>> Cliquez sur le graphique ci-dessous pour comprendre qui sont les loueurs de quels types de biens.

A Genève, la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation (LDTR) interdit de louer un appartement à des touristes plus de 90 jours dans l'année. Pourtant, en trois clics sur Airbnb, rien n'empêche de louer un studio confortable et meublé pendant 91 jours, si ce n'est le prix de 14'253 francs, plutôt dissuasif.

Si le canton a légiféré, il n'existe pas de moyens mis à disposition pour contrôler le respect de la règle. Genève n'agit que sur dénonciation. Il y en a eu trois à ce jour et aucune sanction, selon les indications fournies par le canton.

>> Lire aussi : A Genève, les règles pour encadrer Airbnb se révèlent difficiles à contrôler

Un même hôte pour 30 appartements

Alors qui se cache derrière les profils des hôtes? Il y a d'abord un certain Marc, qui propose plus de 60 logements à Genève. Marc Hazan est en fait le gérant de la société "Key’s and fly", une agence de gestion locative via Airbnb.

La société Key's and Fly assure respecter la réglementation des 90 jours et propose une stratégie mixte entre des locations à la nuitée durant les périodes où la demande est forte et des contrats de bail de courte durée durant les périodes creuses. Une stratégie d'optimisation des rendements qui n'a rien d'illégale et qui permet aux propriétaires d'encaisser 20% de plus en moyenne.

Une sélection plus rude

Sur son site, Key's and Fly propose également des critères de sélection approfondis: "Vous pouvez spécifier vos critères par âge, par amoureux des animaux, par passe-temps et bien plus encore. Le pouvoir sera entre vos mains", peut-on lire sur le site de l'agence.

L'Asloca dénonce la confiscation du parc locatif genevois par Airbnb, surtout dans un contexte de pénurie de logements depuis des décennies. Genève reste le canton romand le plus cher et le plus difficile d'accès.

On estime qu'il y a pénurie en dessous d'un taux de vacance de 1,5%. Comme l'illustre le graphique ci-dessous, Genève n'a jamais atteint ce taux, malgré un rythme de constructions de 2000 logements en moyenne par an ces dernières années.

Les acteurs du marché ne violent pas la loi mais ils ont trouvé un moyen de la contourner

Carole-Anne Kast, Vice présidente de l'Asloca Genève

>> Ecoutez Carole-Anne Kast réagir dans l'émission Forum :

Comment mieux encadrer les activités d’Airbnb? Interview de Carole-Anne Kast
Comment mieux encadrer les activités d’Airbnb? Interview de Carole-Anne Kast / Forum / 5 min. / le 5 août 2021

Conscientes de la problématique, les autorités genevoises envisagent d'encadrer les activités d'Airbnb grâce à la mise en place d'une obligation de déclaration des bailleurs "Airbnb". L'hôte se verrait attribuer un numéro et serait dans l'obligation de transmettre les informations de location, notamment les périodes durant lesquelles le logement est loué.

D'autres métropoles ont déjà légiféré. Madrid a imposé un séjour minimum de cinq nuits dans ce type de logement. Berlin a également demandé que les loueurs qui ne séjournent pas dans l’appartement obtiennent une licence. Et à Paris, des enquêteurs vérifient que les appartements dédiés à la location ne soient pas confisqués par les touristes.

Katia Bitsch/mre/tyf

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