Les autorités genevoises s'apprêtent à lancer ces prochaines semaines des opérations pour cartographier l'arsenal qui dort depuis des décennies au fond du lac Léman pour, dans un premier temps, évaluer les risques.
"A l'automne, nous allons tester les techniques de repérage. On va aller détecter ces masses métalliques depuis des bateaux qui vont utiliser des sonars immergés", a expliqué le géologue cantonal genevois Jacques Martelain.
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Des recherches seront ensuite menées sur l'ensemble de la zone du Petit-lac, à l'intérieur des frontières genevoises, où l'eau est peu profonde (50 à 100 mètres). Ce n'est qu'en fonction des résultats des investigations techniques (sédimentation, analyse de l'eau) et de l'étude des risques, que le canton ira repêcher ou pas les munitions.
Recherche en responsabilité
Des milliers de tonnes de munitions et autres explosifs de l'armée ont été enfouis au fond des lacs suisses au cours du XXe siècle, en particulier après la Seconde Guerre mondiale, afin de s'en débarrasser après l'explosion d'entrepôts en surface et sous la roche, en montagne, à Mitholz.
"Il s'agit principalement de bombes d'aviation, de grenades, de cartouches usuelles et résidus d'explosifs", a détaillé la porte-parole du Département fédéral de la défense (DDPS) Mireille Fleury.
A Genève, ce n'est pas l'armée qui les a immergées, mais l'entreprise d'armement Hispano-Suiza, jusqu'au début des années 1960.
Une recherche en responsabilité a été lancée par les autorités genevoises pour déterminer s'il y a un ayant droit d'Hispano-Suiza de l'époque qui pourrait éventuellement devoir payer une partie de l'assainissement s'il devait avoir lieu.
Risque de corrosion à Genève
En Suisse, plus de 8000 tonnes de munitions et de restes de munitions au total ont été immergées par l'armée au cours du siècle dernier dans les lacs de Thoune, de Brienz et des Quatre-Cantons, dans des eaux plus profondes qu'à Genève et donc moins brassées.
Selon les autorités, qui ont réalisé plusieurs analyses ces dernières années, ces munitions sont recouvertes d'une couche épaisse et croissante de sédiments et ne présentent donc pour l'instant aucun impact négatif sur l'eau. Une surveillance régulière est toutefois mise en oeuvre.
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Genève tablait aussi sur cette sédimentation jusqu'à ce que des plongeurs de l'organisation française Odysseus 3.1 découvrent en 2019 plusieurs caisses de munitions éventrées à 50 mètres de profondeur.
Pour Jacques Martelain, "à partir du moment où ces munitions ne sont pas en tout temps recouvertes par des sédiments et qu'on est dans des eaux moins profondes, on peut raisonnablement imaginer qu'on pourrait avoir des phénomènes de corrosion plus importants" que dans d'autres lacs suisses.
afp/iar
Entre 150 et 1000 tonnes dans le Léman
Des analyses effectuées au début des années 2000 par le DDPS ont estimé les quantités immergées dans le lac Léman entre 150 et 1000 tonnes, sans parvenir à les localiser précisément ni déterminer la typologie des armes.
"Il y a, a priori, des bombes et des obus et probablement aussi des munitions pour fusils", tandis que certains évoquent aussi la présence de bombes au phosgène, un gaz mortel, a détaillé Jacques Martelain.
Plongeuse, l'ancienne députée genevoise Salima Moyard se bat depuis des années pour que Genève s'empare du sujet, estimant que "la seule solution viable sur le long terme est l'assainissement complet, total".
"Me dire qu'il y a des individus qui pourraient se lancer un petit défi d'aller chercher des munitions pour les mettre sur leur cheminée, cela peut être vraiment grave. Grave pour les personnes elles-mêmes, pour le voisinage, pour l'environnement, pour le biotope", a-t-elle déclaré.