Régler ses dettes et, au bout du tunnel, partir en vacances avec sa fille: voilà ce que Margaux va désormais pouvoir faire grâce à son emménagement dans un immeuble un peu particulier. Grâce à ce logement, elle économise 500 francs sur son précédent loyer. Cet immeuble est un bâtiment privé aux loyers modérés destinés aux femmes en difficultés qui passent entre les mailles du filet social.
"J'ai déposé des dossiers en HLM etc. et je n'étais pas prioritaire", explique Margaux dans le reportage diffusé au 19h30. "Je suis une maman seule, mais une maman qui travaille à 100%. Pour eux, ce n'est pas une situation précaire, ce que je peux comprendre. Le problème n'est que financier, j'avais quand même un toit, donc je n'étais pas prioritaire".
Endetté, le père de sa fille ne peut pas l'aider financièrement. Pour toucher des aides publiques, elle devrait baisser son taux de travail: c'est le serpent qui se mord la queue.
Rebondir
C'est justement pour permettre aux femmes comme elle de rebondir que l'association Les Vernets d'Arve œuvre depuis soixante ans, à l'initiative de la doctoresse Renée Girod qui a mis les premiers fonds. Quand le premier immeuble est inauguré en 1962, les femmes n'ont pas encore le droit de vote et ne peuvent pas ouvrir un compte bancaire, ni même signer un bail. En cas de divorce, elles dépendent de leur ex-mari ou de leur père.
"On a décidé de rester fidèles à ça", affirme Sheila Buemi Moore, présidente de l'association. "Ce n'est peut-être pas toujours les mêmes problématiques, mais il y a toujours des obstacles pour les femmes".
Un quatrième immeuble a été inauguré en septembre pour un total de 158 appartements dans le canton de Genève. En tout, plus de 600 femmes ont été aidées, dont 40% de Suissesses.
Déterminée à s'en sortir
Comme conditions pour un appartement, il faut être une femme seule ou avec enfant(s) à charge, avoir un travail, un statut légal et être déterminée à s'en sortir.
"Il y a beaucoup de femmes qui sont payées à l'heure et n'ont pas forcément les charges sociales. Peut-être qu'elles pensent que ça vaut la peine, mais après, plus tard, pour la retraite, pas du tout. Ces femmes doivent s'instruire, vraiment", souligne Sheila Buemi Moore.
C'est le cas d'Aparecida, qui a dormi un an dans le salon d'une amie après son divorce. Ses revenus de femme de ménage étaient insuffisants pour conclure un bail et, sans enfant, elle n'était pas prioritaire pour un HLM. Jusqu'à apprendre l'existence de l'association, qui lui trouve un logement: "Alors là, j'ai retrouvé le sourire. Parce que d'avoir un toit, c'est quelque chose", témoigne-t-elle.
Une formation et un travail
Grâce à son loyer inférieur à 600 francs, elle a pu dégager du temps pour passer un certificat fédéral en intendance. Une ascension professionnelle qui lui permet d'éviter de dépendre de l'aide sociale.
"Là,j'ai trouvé un 60% dans un foyer pour les enfants et je suis très contente. J'ai bien avancé!", sourit Aparecida. La prochaine étape sera pour elle de passer un CFC tout en poursuivant ses cours de français et d'informatique.
Margaux, elle aussi, vise une reconversion en se formant les week-ends au métier de thérapeute en réflexologie: "Dans deux ans [ma fille] rentre à l'école. Je pense que ce sera peut-être le temps de laisser l'appartement à quelqu'un d'autre et j'espère que ça lui rendra service comme ça a pu le faire pour moi".
Cecilia Mendoza/sjaq