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Trois départements genevois mobilisés pour les mineures rapatriées de Syrie

Retour de deux filles de djihadistes à Genève: quelle prise en charge ?
Retour de deux filles de djihadistes à Genève: quelle prise en charge ? / Forum / 3 min. / le 7 décembre 2021
Les deux jeunes filles revenues d’un camp syrien lundi soir, après avoir été enlevées par leur mère en 2016, seront prises en charge par divers services de l’Etat genevois, a appris la RTS. Elles pourraient suivre un processus de déradicalisation. L'avocat de leurs pères rappelle qu'elles restent des victimes.

Lundi soir, deux mineures vivant en Syrie ont été rapatriées à Genève après avoir été enlevées, en 2016, par leur mère, sympathisante de l'Etat islamique. Ce retour en Suisse est une première. La mère de ces deux jeunes filles de 9 et 15 ans et son avocate ont donné leur accord à ce rapatriement, organisé avec l'aide des autorités helvétiques. Dès lors, comment ces deux jeunes filles vont-elles être prises en charge?

Le dossier est ultrasensible. Très peu d'informations ne filtrent pour l’heure. Et pour cause: l'affaire conjugue deux éléments délicats: la lutte contre le terrorisme, d'une part, et d'autre part, l'âge précoce des deux personnes impliquées, puisqu'il s'agit d'enfants.

Ce que l'on sait à ce stade, c'est que le dossier est en mains du canton d'origine de ces jeunes filles, à savoir Genève. Le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) s'est occupé jusqu'ici du rapatriement des mineures ainsi que de leur protection consulaire. Désormais, c'est aux autorités genevoises de les prendre en charge, en lien avec l'Office fédéral de la police (FedPol).

Le SPMi au front

A Genève, trois départements sont mobilisés, selon les informations recueillies par la RTS. Il y a d'abord le Département de l'instruction publique (DIP). Il chapeaute le Service de protection des mineurs (SPMi), qui est sollicité dans l'affaire. Les deux jeunes filles revenues de Syrie ont une curatrice, une personne qui s'occupe et défend leurs intérêts.

Celle-ci est chargée du dossier depuis deux ans déjà. Soit le moment où la mère des jeunes filles a été déchue de sa nationalité pour ses liens avec Daech. Et où les deux papas ont perdu la garde des enfants pour les empêcher de tenter d'aller chercher eux-mêmes, en Syrie, leurs progéniture. A ce jour, cette situation prévaut: les deux pères n'ont pas retrouvé la garde de leur enfant respectif.

Social et sécurité

Le Département de la cohésion sociale (DCS) est également mis à contribution, car il contrôle un autre acteur clé de ce dossier: la FASe, la Fondation genevoise pour l'animation socioculturelle. Un organisme qui met notamment en œuvre des actions socio-éducatives et emploie des travailleurs sociaux.

Enfin, le troisième département genevois mobilisé est celui de la sécurité (DSPS). Le délégué au Réseau national de sécurité, André Duvillard, le disait mardi matin dans La Matinale: "Tout ce qui est mis en place part du principe que ces filles sont radicalisées". Il existe dès lors, aux yeux des autorités, un risque pour la société lié à ce rapatriement.

>> Lire : Les deux enfants rapatriés de Syrie se verront "offrir un cadre stable" en Suisse

Déradicalisation?

Il est impossible de le dire avec certitude, mais il est probable que les deux mineures revenues de Syrie suivent un processus de déradicalisation, appelé processus de "désengagement". Une évaluation est alors opérée par une cellule d'assistants sociaux et de psychologues, chargée d'évaluer les besoins de ces jeunes filles, leur fonctionnement, leur vécu ou leur état psychologique.

L’opération est complexe: les mineures genevoises sont certes de retour sur leur lieu de vie initial, mais elles ont dû pour cela quitter leur mère et leur autre demi-sœur, restées en Syrie. Sans parler des traumatismes de la guerre.

Joint par la RTS, le professeur de psychologie légale Philip Jaffé tient à relativiser cette radicalisation présumée. Ce spécialiste du droit des enfants estime que ce sont d’abord des enfants. "Il ne faut pas trop leur coller d'étiquettes", souligne-t-il. "Car cela est le meilleur moyen de provoquer ce que l'on craint qu'elles deviennent. Il est important de rapidement les réintégrer dans leur vie d'enfants et de les traiter comme tels."

"Des victimes"

Cet avis est partagé par l’avocat des deux pères, Me Olivier Peter. Il souhaite fermement rappeler que "ces enfants sont des victimes". Victimes d'un enlèvement alors qu'elles étaient déjà socialisées en Suisse, victimes de la guerre et de conditions de vie "effroyables" dans les camps en Syrie. Sur ce dernier point, dit-il, "l'Etat suisse aurait pu agir plus rapidement, même si nous saluons les efforts ayant mené au retour".

Me Olivier Peter appelle aussi à un certain calme autour de cette affaire. "Ces enfants doivent maintenant bénéficier de la meilleure prise en charge possible pour tenter de se reconstruire", indique-t-il.

Raphaël Leroy

>> Écouter également l'interview de la journaliste indépendante Céline Martelet dans Forum :

Comment se passe les retours d’enfants de djihadistes? Interview de Céline Martelet
Comment se passe les retours d’enfants de djihadistes? Interview de Céline Martelet / Forum / 5 min. / le 7 décembre 2021
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