Les députés de la commission s'étaient déjà intéressés au sujet en fin d'année dernière. Mais lundi, ils ont décidé d'aller plus loin, en créant, à l'unanimité, une sous-commission.
C'est un article du Temps qui a levé le lièvre, fin septembre. Le journal parlait de graves dysfonctionnements qui ont cours dans un foyer genevois, qui accueille 24 heures sur 24 des adolescents atteints de pathologies lourdes. Il est question de locaux inadaptés et vétustes, de manques de moyens d'encadrement et de vision, ainsi que d'une direction peu à l'écoute.
Le Département pointé du doigt
Le Département de l'instruction publique, qui a la tutelle du foyer, est également épinglé pour sa lenteur à réagir. Ce n'est qu'au printemps 2021 qu'il a décidé de lancer une analyse externe alors que les alertes se multipliaient depuis plusieurs mois. Cet audit aboutira au renvoi de la directrice du foyer, en septembre.
Parallèlement, la co-directrice de la Comédie de Genève, Natacha Koutchoumov, porte plainte pour les maltraitances dont a été victime son fils autiste dans le foyer incriminé.
Justice saisie
En décembre, la commission de contrôle de gestion du Grand Conseil émet des recommandations et révèle que le Département de l'instruction publique a saisi la justice pour une violation potentielle du devoir d’assistance ou d’éducation. Dans le même temps, la directrice générale de l'Office médico-pédagogique, qui chapeaute le foyer, est mise à l'écart.
Une deuxième expertise est lancée pour clarifier les responsabilités relatives aux faits de maltraitance. Ses conclusions seront connues à la fin février. L'affaire en était restée là, jusqu'à de nouvelles révélations du Temps et d'Heidi.news, la semaine passée. On apprend que la maltraitance des enfants, loin d'être isolée, était monnaie courante dans le foyer jusqu'au printemps dernier.
Des enfants auraient été privés de nourriture, enfermés, projetés au sol, laissés dans leurs excréments ou encore traînés d'une pièce à l'autre par leurs vêtements. Une autiste de 13 ans a même dû être hospitalisée, en mars 2021, pour une surmédication suspecte. Là encore, la justice est saisie. Ce sont donc ces derniers éléments qui ont motivé les députés genevois à reprendre leurs investigations aujourd'hui.
Anne Emery-Torracinta se défend
"Je tiens à faire toute la lumière sur ce qui s'est passé. Et le Département a toujours agi en temps et en heure", a réagi la conseillère d'Etat Anne Emery-Torracinta, en charge du Département de l'instruction publique, interrogée dans Forum.
Elle reconnaît toutefois qu'il y a clairement un souci de gouvernance, et que le but de la deuxième expertise lancée est d'établir pourquoi des faits aussi graves, qui auraient nécessité une dénonciation pénale immédiate, n'ont pas été dénoncés à la justice et ne sont pas parvenus jusqu'à la tête du Département cantonal. "Le but est aussi de faire en sorte que plus jamais des choses pareilles ne puissent se reproduire".
Plusieurs changements sont déjà intervenus à la direction et dans le personnel, et "je peux vous garantir aujourd'hui qu'il n'est plus question de maltraitance dans ce foyer et que les choses sont prises en main", a insisté la magistrate socialiste.
La sous-commission est composée par Cyril Aellen (PLR), Jennifer Conti (PS) et Thierry Cerutti (MCG), a fait savoir la commission de contrôle de gestion.
Ouvert en juin 2018 à Collonge-Bellerive, le foyer spécialisé de Mancy accueille une dizaine de jeunes de 8 à 18 ans souffrant d'autisme ou de déficiences intellectuelles.
Raphaël Leroy/ats/jpr