Le défilé était une sorte de prélude à la douzième Conférence ministérielle de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), qui s'ouvre dimanche à Genève. Pour les petits paysans, l'OMC, garante des accords de libre-échange dans monde, est synonyme de ruine et de mort. "Nous manifestons pour en finir avec cette organisation", a déclaré une manifestante.
Les petites organisations paysannes reprochent à l'OMC d'avoir incité de nombreux pays à abandonner une production alimentaire destinée à nourrir leur population au profit d'une production liée à l'exportation. Le résultat est que les multinationales s'accaparent les terres et l'eau partout, et font disparaître les paysans.
La promotion du libre-échange des produits agricoles conduit aussi à la spéculation sur les denrées alimentaires. La crise sanitaire, puis, aujourd'hui, la guerre entre l'Ukraine et la Russie, deux grands pays producteurs de céréales, n'ont fait qu'aggraver la situation, ont déploré les manifestants.
Une organisation "meurtrière"
"Nous voulons une souveraineté alimentaire" pour les pays et "nous voulons une régulation des marchés". L'OMC, aux yeux des représentants des petits paysans, est une organisation "meurtrière". A travers le libre-échange et le pouvoir qu'il donne aux multinationales, "elle affame les peuples".
La manifestation, organisée notamment par La Via Campesina, Uniterre et la Confédération paysanne, a fait l'objet d'une étroite surveillance de la part de la police genevoise à cause de la présence d'une trentaine de "black blocs", tous vêtus de noir et le visage masqué.
Des policiers caparaçonnés dans leur tenue anti-émeute ont suivi le cortège tout au long du parcours. Leurs collègues voltigeurs à moto étaient également présents en nombre. Aucun débordement n'a été constaté.
ats/iar
Réunion "à haut risque"
Cette première réunion ministérielle de l'OMC depuis plus de quatre ans s'ouvre dimanche avec l'espoir d'accords sur la pêche et les brevets des vaccins anti-Covid. Mais les divergences restent grandes entre les différents acteurs avec, en toile de fond, une crise alimentaire mondiale. L'organe suprême de l'organisation est attendu au tournant pour contribuer à trouver une parade à ce danger.
La guerre sera évidemment très présente dès les déclarations des ministres dimanche et tout au long de la conférence, les Etats-Unis ou encore l'UE refusant de parler directement aux Russes. Cela n'a pas empêché pour l'instant les négociations, mais "le risque est réel que les choses déraillent la semaine prochaine", selon une source diplomatique genevoise.
Intransigeance indienne
La pêche reste le dossier phare de la réunion. L'OMC a annoncé tôt samedi qu'un projet de texte qui doit permettre de supprimer les subventions préjudiciables - favorisant la surpêche ou la pêche illégale -, un sujet qui occupe l'organisation depuis 20 ans, est désormais aux mains des ministres.
L'OMC fonctionnant par consensus, il faut que les 164 pays membres s'entendent pour conclure. Le succès de la conférence se mesurera grandement à l'aune de l'adoption ou non de ce texte. Mais l'Inde est pointée du doigt pour ses blocages qui, selon de nombreux diplomates, pourrait faire capoter d'autres dossiers.