Les Hells Angels sortent du silence. Ils ont accepté de conduire en exclusivité la RTS jusqu'à leur QG, dans une zone industrielle de la périphérie genevoise, à Vernier. C'est la toute première fois, depuis plus de vingt ans d'existence du club dans le canton, qu'une caméra de télévision pénètre dans cet endroit très bien gardé.
Le lieu dispose d'une salle de conférence, de toilettes, de douches, de dortoirs à l’étage, d'une cuisine et d'un bar. "Nous pouvons ainsi y recevoir des frères qui viennent de l'étranger en moto", indique Ben, l'un des membres, vendredi au 19h30. "Quand nous voyageons, nous nous arrêtons aussi dans différents chapitres en Europe."
D'après les informations de la RTS, c'est dans ce local que l'un des Hells Angel, blessé par balle, est venu se réfugier après la fusillade genevoise contre des membres des Bandidos. Avant d'être finalement interpellé par la police.
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"Pas des 'chanteurs à la Croix de Bois'"
Pour les Hells Angels, il n'est pas question de lâcher leurs frères impliqués dans la fusillade. Leurs frais d'avocats sont d'ailleurs totalement payés par le club, qui soutient aussi leurs familles. Chez eux, la fraternité est une valeur cardinale, pour le meilleur et pour le pire. "Cette histoire de fusillade? Nous n'en parlons pas, parce qu'il y a une procédure judiciaire en cours", explique Terry, président des Hells Angels genevois.
Mais d'ajouter: "Nous ne sommes pas des 'chanteurs à la Croix de Bois'. Nous sommes les Hells Angels et nous l'assumons", assure-t-il. Terry se défend toutefois d'appartenir à une organisation criminelle. "Comme dans tous les milieux - vu que nous sommes nombreux - il peut y avoir des erreurs. C'est tout à fait normal, ça fait partie de la vie", estime-t-il.
Dans certains pays, les Hells Angels sont considérés comme une organisation criminelle, et parfois interdits. Historiquement, ils ont souvent été liés au trafic de drogue, à la prostitution ou encore au recouvrement de dettes.
En Suisse, d'après l'Office fédéral de la police (Fedpol), ils sont surtout connus pour des faits de violence et des infractions à la loi sur les armes et les stupéfiants. A Genève, d'après les informations de la RTS, ils auraient géré par le passé des salons de prostitution. Ce ne serait plus le cas aujourd'hui, même si certains continueraient à y assurer la sécurité. Pour ce qui est du trafic de drogue, ils auraient inscrit dans leur règlement interne l'interdiction d'y toucher.
La rivalité avec les Bandidos
Lors de la visite de la RTS, ils sont une dizaine de membres à être venus assister à la séance hebdomadaire. Il est impossible de savoir en revanche combien de membres compte le chapitre genevois. Ce qui est certain, c'est qu'à Genève, en Suisse ou à l'international, les Hells Angels dominent les clubs de moto.
"Depuis les années 1980, nous avons réussi à établir une 'entente' entre tous les clubs", raconte Terry. "Nous savons comment faire pour éviter qu'il y ait des histoires (...), pour que des gars qui viennent d'autres pays, avec leurs problèmes, ne fassent pas tout et n'importe quoi."
Chez les Hells Angels, on ne prononce par le nom des Bandidos, mais ce sont bien eux qui sont visés. Depuis 2021, ce club rival veut s'implanter dans le pays, suscitant des violences et des tensions. "Ils s'imposent sans respecter les règles établies depuis des années entre tous les moto-clubs suisses", accuse Ben.
D'après Fedpol, "il existe en Suisse un potentiel de conflit sérieux dans le milieu des groupes de motards ou assimilés". Que va-t-il se passer si les Bandidos persistent à vouloir s'installer à Genève? Réponse des Hells Angels: "No comment."
Flore Amos/vajo