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La crise couve au sein de la police genevoise

La crise couve à nouveau au sein de la police genevoise
La crise couve à nouveau au sein de la police genevoise / Forum / 3 min. / le 14 octobre 2022
La commission du personnel a envoyé, le mois dernier, une lettre alarmante à son magistrat de tutelle, Mauro Poggia, a appris la RTS. Elle dénonce d'importants dysfonctionnements qui seraient le fait de la direction de la police. Les membres de cette commission menacent de démissionner en bloc sans changements décisifs. Du jamais vu.

Le malaise est patent au sein du personnel de la police genevoise. Ses représentants ont écrit, le 20 septembre dernier, à leur conseiller d’Etat de tutelle, Mauro Poggia, a appris le Pôle enquête de la RTS. Dans leur missive, ils signalent des défaillances à plusieurs niveaux et estiment ne pas être entendus par leur direction. Fait inédit: ils avancent vouloir démissionner si des changements n’interviennent pas. Mauro Poggia les invite à maintenir le dialogue et demande des comptes à la commandante de la police, Monica Bonfanti.

La situation est inédite, en effet, pour un partenaire social qui n'a pas pour habitude de ruer dans les brancards, comme peuvent le faire les syndicats de police à Genève. La commission du personnel regroupe neuf personnes, toutes élues par leurs pairs. Elle rassemble tous les métiers de la police, des gendarmes aux inspecteurs, en passant par des administratifs ou des assistants de sécurité publique. Elle est régulièrement consultée sur toutes les questions présentant un intérêt général pour le personnel. Leur activité est, en somme, complémentaire à celle des syndicats.

Suspicion généralisée

Dans une lettre de sept pages que le Pôle enquête de la RTS s’est procurée, la commission du personnel de la police genevoise liste tous les dysfonctionnements auxquels elle fait face, souvent depuis plusieurs années. Cela a trait au fonctionnement des forces de l'ordre. Archaïque en termes de numérique, chaotique dans les horaires ou encore en perte de vitesse dans la lutte contre le crime organisé.

Cela concerne aussi la gestion du personnel où les inégalités de traitement seraient légions. Les évolutions de carrière sont décrites comme illogiques, sans rapport avec les compétences. La déontologie et la communication sont également pointées du doigt, où il est notamment question de suspicion généralisée envers le personnel. "Un grand nombre de collaborateurs nous ont interpellés et nous ont fait part de leurs inquiétudes, souvent identiques indépendamment de leur service d’attribution", relève la commission du personnel.

Monica Bonfanti visée

Pour les autrices et auteurs de la lettre, il y a un responsable à cette situation. Ils évoquent la Direction de la police. Un terme générique. Mais on comprend à travers les lignes que c'est la commandante Monica Bonfanti qui est principalement visée par les critiques. En poste depuis seize ans, elle est accusée de maintenir le statu quo malgré les tentatives du partenaire social de trouver des solutions. "Nous constatons au quotidien que l’immobilisme farouche que nous rencontrons est le résultat d’une volonté de défendre coûte que coûte le système en place", écrivent-ils.

En 2017, un sondage effectué auprès des employés faisait état d'une perte de confiance de la base envers sa hiérarchie. La commission du personnel constate que, cinq ans plus tard, aucune mesure n'a été prise pour y faire face. Dès lors, cette situation perdure. Elle engendre mouvements syndicaux, départs anticipés et manque de motivation, selon les membres de la commission. "La crise institutionnelle décrite, qui existe déjà depuis de nombreuses années, ne fait que grandir", assurent-ils avant d’avertir. "Las d’être instrumentalisés et contraints de dresser le bilan de l’immobilisme, sans changements décisifs, l’entier des membres de la Commission du personnel de la police ne verrait pas d’autre solution que de démissionner de son rôle de représentants du personnel."

Mauro Poggia répond

Qu’en pense la principale intéressée, Monica Bonfanti? Le Pôle enquête de la RTS a contacté les services de la commandante. Mais c'est le conseiller d'Etat de tutelle de la police genevoise qui répond à sa place. Mauro Poggia va d'ailleurs envoyer la semaine prochaine une réponse écrite à la commission du personnel. L'élu MCG entend l'inquiétude exprimée, déjà à de maintes occasions, par la commission. Il l'invite à maintenir le dialogue pour améliorer le fonctionnement des forces de l'ordre.

Mauro Poggia précise avoir demandé à Monica Bonfanti de lui transmettre des explications détaillées sur chacun des points évoqués par le personnel avant de répondre à la commission. Il compte requérir, chaque semaine, un état des lieux de l'avancée de ces diverses problématiques au commandement de la police genevoise. Enfin, le magistrat prévoit de créer, début novembre, une délégation comprenant le personnel pour plancher sur la révision de la très controversée loi sur la police. Une loi qui vient cependant d'être modifiée par une commission parlementaire, comme l'a indiqué la Tribune de Genève. Le Grand Conseil aura le dernier mot.

Raphaël Leroy, Pôle enquête

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