La sécurité des enfants genevois est-elle bien garantie au niveau de l'accueil parascolaire? La question semble se poser. Une cinquantaine d’employés du Groupement intercommunal pour l’animation parascolaire (GIAP) estiment que le taux d’encadrement des élèves est trop bas, a appris la RTS mardi. Ils ont répondu à un sondage du syndicat SIT pour faire part de leur vécu depuis la rentrée scolaire. Les résultats sont inquiétants, notamment pour ce qui est de la sécurité des enfants.
A Genève, le parascolaire est depuis longtemps chroniquement surchargé, mais cette année est encore plus difficile. Le nombre d'élèves inscrits aux activités du midi et de 16h à 18h a augmenté de 13%. Une augmentation que le GIAP a du mal à encaisser.
Deux animatrices pour 56 enfants
Certains employés rapportent des situations ubuesques et des pics de crises inquiétants, comme le cas d’une école du centre-ville où deux animatrices devaient emmener 56 enfants de 4 à 6 ans au restaurant scolaire. Problème: elles doivent traverser trois passages piétons avec ces tout-petits.
Dans une autre école, trois animatrices ont dû s'occuper de 80 enfants pendant deux semaines. Et on peut encore citer cette autre école où six animateurs, dont deux remplaçants, ont dû encadrer 180 enfants. Tous ces cas illustrent des moments de crise – et non pas la norme – mais sont tout de même considérés comme inacceptables par tous les professionnels du domaine.
Après vérification de ses données statistiques, le GIAP conteste ces chiffres, qui, à son avis, dénotent plutôt d’une confusion, de la part des personnes qui les avancent, entre le nombre d’enfants inscrits et le nombre d’enfants réellement pris en charge (soit, présents).
Le GIAP préconise en effet des encadrements de 10 à 12 enfants par adulte pour les élèves de 1P et 2P; 12 à 16 enfants par adulte pour les élèves de 3P à 6P; et 17 à 20 pour les plus grands.
Difficulté de recruter et garder les employés
Ce manque d’encadrement a plusieurs explications. "A Genève, la loi oblige à accueillir tout enfant dont les parents font la demande d'une place en parascolaire. Chaque année le nombre d'enfants accueillis augmente énormément", avance Floriane Demont, directrice du GIAP.
Mais à cela s'ajoutent d'autres facteurs explicatifs, comme le taux d'absentéisme, qui s'élève au mois de novembre à 14%, soit le double du seuil d'alerte de l'Etat, qui suggère un problème collectif. Un absentéisme qui prend peut-être racine dans les mauvaises conditions de travail au GIAP. C’est en tout cas ce que pense Alice Lefrançois, secrétaire syndicale au SIT. "Actuellement, une animatrice travaille au maximum à un taux de 53,75 % pour un salaire de 2500 francs par mois et avec des horaires coupés", souligne-t-elle. Pour la syndicaliste, il s’agit d’un taux partiel subi. "On se retrouve avec des personnes qui vont faire des ménages dans les bureaux dès 05h00 du matin avant de venir travailler au parascolaire. D’autres font chauffeur Uber à côté, alors qu’elles sont proches de l’âge de la retraite, pour essayer d’avoir une rente décente. Evidemment, c’est difficile de recruter avec des conditions pareilles!"
Parents inquiets et sidérés
Même si la situation actuelle semble exceptionnelle, les parents sont inquiets. "Nous sommes sidérés d’entendre des taux d’encadrement pareils et craignons pour la sécurité des enfants", s’indigne Anne Thorel Ruegsegger, secrétaire générale de la Fédération des associations de parents d’élèves. Pour elle, la solution serait d’augmenter d’urgence les moyens mis à disposition du GIAP.
En ce sens, elle rejoint les demandes des employés du parascolaire, qui lancent aujourd'hui une pétition pour renforcer immédiatement les équipes en sous-effectifs et pour obtenir une augmentation des salaires et des temps de travail.
Mohamed Musadak
"Nous travaillons d'arrache-pied pour que cette situation ne dure pas"
"J'aimerais rappeler qu'on est aujourd'hui dans une situation exceptionnelle, de transition", a réagi Floriane Demont, directrice du Groupement intercommunal pour l'animation parascolaire, dans l'émission Forum mardi. "Avec des difficultés, des équipes dans lesquelles les taux d'encadrement sont clairement trop élevés."
Cette situation n'est pas généralisée dans l'ensemble du canton, mais dans certaines équipes parmi les 143 du groupement intercommunal, précise la responsable.
"La situation n'est pas optimale, j'entends les préoccupations des parents et du personnel. Mais il est bien évident que nous assurons, dans ces équipes, la sécurité des enfants, qui n'est pas remise en question", souligne-t-elle.
Cette situation est "extrêmement provisoire", fait valoir Floriane Demont. "La qualité de la prestation, avec les belles animations que nous réalisons au quotidien, n'est pas là dans ces équipes, puisque nous assurons la sécurité."
L'absentéisme est, quant à lui, autant voire davantage un élément saisonnier - avec la recrudescence des virus - que le fait d'une fatigue collective, estime la responsable.
Devant la croissance inédite - et non anticipable - de la fréquentation de l'accueil parascolaire, le GIAP est fortement mobilisé, assure Flore Demont. "Nous avons travaillé d'arrache-pied ces derniers mois pour recruter du personnel, pour que cette situation ne dure pas. Ce personnel arrive, nous avons déjà recruté 210 personnes en trois mois."