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La réforme de l'aide sociale rejetée à Genève

La réforme de l'aide sociale a été balayée par la commission des affaires sociales du Grand conseil genevois
La réforme de l'aide sociale a été balayée par la commission des affaires sociales du Grand conseil genevois / Forum / 2 min. / le 11 janvier 2023
A Genève, c'est un véritable camouflet pour Thierry Apothéloz, le conseiller d'Etat chargé de la cohésion sociale et candidat à sa réélection en avril. Son ambitieuse réforme de l'aide sociale a été balayée mardi soir par la Commission des affaires sociales du Grand Conseil. Le magistrat socialiste parle d'un simple "accident de parcours parlementaire".

Cette loi est la mère de toutes les batailles pour Thierry Apothéloz, le projet phare de sa législature. Il est le fruit d'un travail débuté il y a plus de quatre ans. Les milieux professionnels du social ont été largement consultés et sont convaincus de la pertinence de la réforme, mais la Commission des affaires sociales ne l'a pas entendu de cette oreille et a décidé de ne même pas entrer en matière. C'est un coup dur pour le ministre socialiste.

Interrogé mercredi soir dans l'émission Forum de la RTS, il a déclaré ne pas voir le refus de la Commission "comme une douche froide, parce que l'eau n'a même pas commencé à couler". Il s'agit à ses yeux "d'un accident de parcours parlementaire".

Selon lui, la droite est toujours intéressée par ce projet. "Le paradoxe réside dans le fait qu'ils ont annoncé vouloir ne pas entrer en matière, mais quand même discuter. Je compte donc sur le Parlement pour que ce projet soit renvoyé en Commission et qu'on puisse reprendre les travaux comme si de rien n'était", déclare le magistrat.

>> Voir l'interview de Thierry Apothéloz mercredi dans Forum :

Révision de la loi sur l'aide sociale rejetée à Genève: interview de Thierry Apothéloz
Révision de la loi sur l'aide sociale rejetée à Genève: interview de Thierry Apothéloz / Forum / 4 min. / le 11 janvier 2023

Changement de paradigme

Le projet de loi propose un véritable changement de paradigme. Pour réinsérer les bénéficiaires de l'aide sociale, la réforme privilégie l'incitation plutôt que la contrainte. Par exemple, sous le régime actuel, une personne qui touche l'aide sociale et qui travaille à 40% voit la totalité de son salaire déduit du montant de l'aide. Pour les auteurs du projet, il s'agit d'un frein au retour à l'emploi, puisqu'on n'est pas incité à trouver un travail. La nouvelle législation permettrait de garder une partie du salaire, poussant ainsi à renouer avec le travail.

>> Les détails de la réforme :

La réforme de l'aide sociale a été balayée par la commission des affaires sociales du Grand conseil genevois
La réforme de l'aide sociale a été balayée par la commission des affaires sociales du Grand conseil genevois / Forum / 2 min. / le 11 janvier 2023

La réforme prévoit également un suivi plus serré des bénéficiaires et met surtout l'accent sur le nerf de la guerre: la formation. Une personne sur deux touchant l'aide sociale n'est pas allée plus loin que l'école obligatoire.

Le bilan du ministre au centre des stratégies

Pour quelles raisons le projet n'a-t-il pas convaincu la Commission? Cette loi est conçue comme un investissement: dépenser plus pour réinsérer les bénéficiaires, réduire l'augmentation de ceux-ci, et à terme réaliser des économies, estimées à au moins 140 millions de francs, voire plus.

Mais à Genève, le social coûte déjà 1,2 milliard de francs en comptant toutes les prestations. Le nombre de bénéficiaires, lui, explose. En dix ans, il a augmenté de 76%. L'idée de dépenser plus ne séduit pas une partie de la droite. Pourtant, ce ne serait pas la véritable raison du rejet d'hier soir.

En effet, selon les informations de la RTS, une partie des élus ont voulu taper du poing sur la table. Ils se sont sentis pressés par la gauche qui voulait à tout prix voter la loi avant la fin de législature. A l'inverse, à gauche, on pense qu'il s'agit d'une manœuvre politique pour retarder l'adoption de la loi avant la fin de la législature et empêcher Thierry Apothéloz de présenter un bilan concret lors de la campagne électorale qui s'annonce.

Action du collège gouvernemental

Selon le principal intéressé, la question du bilan personnel ne se pose pas, car son action s'inscrit dans le cadre du collège gouvernemental.

Thierry Apothéloz rappelle d'autres chantiers législatifs, tels que le projet de loi sur le surendettement, qui doit aussi être approuvé par le Grand Conseil. "On ne construit pas un bilan sur un incident parlementaire qui sera réglé dans quelques mois", dit-il, assurant n'avoir jamais exigé de délai avant la fin de la législature.

Je gouverne avec mes six autres collègues du conseil d'Etat. C'est ça qui compte

Thierry Apothéloz

La loi n'est en aucun cas enterrée. Mais elle ne pourra être adoptée qu'après les élections qui se tiendront au mois d'avril.

Sujet radio: Mohamed Musadak
Propos de Thierry Apothéloz recueillis par Mehmet Gultas
Texte web: ami

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