La Cour des comptes épingle le Conseil d'Etat genevois sur les attributions de mandats

L'Etat de Genève "affligé" par le rapport de la cour des Comptes sur sa gestion des mandats externes (vidéo)
L'Etat de Genève "affligé" par le rapport de la cour des Comptes sur sa gestion des mandats externes (vidéo) / Forum / 3 min. / le 16 décembre 2024
La Cour des comptes a publié lundi un rapport sans concessions sur l'acquisition de prestations de services et l'attribution de mandats au sein de l'Etat de Genève. Epinglé par le "gendarme de l'administration", le Conseil d'Etat fustige un rapport biaisé au vocabulaire tendancieux.

La Cour des comptes a découvert que des subventions étaient octroyées par le biais de contrats de mandat. Une pratique qui constitue "une violation des dispositions" de la loi sur les indemnités et les aides financières (LIAF). Une quinzaine de cas de ce type ont été recensés.

Aucune trace de corruption n'a toutefois été mise à jour, a souligné le co-auteur du rapport François Paychère. Le magistrat n'a pas exclu qu'il y ait eu parfois une volonté de s'affranchir des règles ou que certains ont agi par méconnaissance de celles-ci.

>> Les explications dans le 12h30 :

L'Etat de Genève est épinglé par la Cour des Comptes sur sa gestion des mandats externes. [Keystone - Salvatore Di Nolfi]Keystone - Salvatore Di Nolfi
L'Etat de Genève épinglé par la Cour des comptes sur sa gestion des mandats externes / Le 12h30 / 1 min. / le 16 décembre 2024

Des mandats de gré à gré

Un autre constat des magistrats enquêteurs est qu'il "n'est pas toujours possible de comprendre a posteriori les raisons qui poussent l'Etat à faire recours à un tiers et en quoi la dépense sert à atteindre des objectifs de politiques publiques".

La Cour des comptes a également constaté que l'Etat a accordé des mandats de gré à gré alors qu'ils auraient dû être soumis à la législation sur les marchés publics. Un office a ainsi attribué trois mandats aux objectifs proches à deux sociétés dirigées par la même personne.

Pour la Cour des comptes, les trois mandats auraient dû être considérés comme un même marché. Le morcellement a permis d'éviter de devoir passer par une procédure ouverte à tous les fournisseurs.

Recommandations refusées

La Cour des comptes préconise des mesures "simples" qui permettraient d'améliorer le processus et combler les lacunes qui ont été identifiées, mais elle se plaint de n'avoir pas eu l'attention désirée du Conseil d'Etat. Sur les dix recommandations, sept ont été refusées sans explication, a déploré François Paychère.

Le magistrat ne s'explique pas ce "désintérêt" de l'exécutif. "Nous proposons des choses basiques, qui n'ont rien de révolutionnaire", a-t-il souligné. La Cour des comptes recommande, par exemple, à l'Etat de clarifier la notion de marché et sa délimitation.

Un rapport "biaisé" selon le Conseil d'Etat

Lors d'une conférence de presse inédite, le Conseil d'Etat a dénoncé "un rapport biaisé". "Ce rapport entaché de lacunes, d'approximation et à l'approche douteuse fait planer un soupçon inacceptable", a relevé Nathalie Fontanet, présidente de l'exécutif.

Elle reproche à la Cour des comptes de vouloir "manifestement aggraver la situation et la perception qu'en auraient les Genevois". Invitée lundi de l'émission Forum, Nathalie Fontanet a également pointé du doigt des conclusions qui ne représentent qu'une proportion infime de la réalité d'après elle. "Dans ce cas-là, il se trouve que le rapport fait des généralités en ne parlant que de 84 achats sur 36'000. Le rapport fait un audit de conformité. Si une des différentes conditions, une des différentes étapes qui devrait être réalisées ne l'est pas, c'est l'ensemble du mandat qui est jugé non conforme", relève-t-elle.

>> Réécouter l'interview intégrale de Nathalie Fontanet dans l'émission Forum :

L'Etat de Genève "affligé" par le rapport de la cour des Comptes: interview de Nathalie Fontanet (vidéo)
L'Etat de Genève "affligé" par le rapport de la cour des Comptes: interview de Nathalie Fontanet (vidéo) / Forum / 6 min. / le 16 décembre 2024

Le Conseil d'Etat reconnaît toutefois que le système d'achat est perfectible, mais précise qu'un projet visant à redéfinir les marchés transversaux des départements est en cours. C'est pourquoi quatre des recommandations considérées comme redondantes sont refusées. Une autre recommandation rejetée consistait, selon le Conseil d'Etat, à mettre en place "des contrôleuses et des contrôleurs pour contrôler les personnes chargées du contrôle". L'exécutif ne veut pas d'une bureaucratie alourdie qui va à l'encontre des principes d'autonomie et d'agilité au sein de l'Etat.

Vocabulaire tendancieux

Au-delà du fond, l'opposition de l'exécutif porte aussi sur la forme du rapport qui utilise un vocabulaire tendancieux avec des termes tels que "corruption" ou "fraude" alors même que la Cour n'a précisément constaté aucune fraude, ni dommage financier.

Il s'agissait de l'ultime rapport des magistrats actuels de la Cour des comptes dont le mandat se termine à la fin de l'année.

ats/miro/ther

Publié Modifié