Du Soudan au Proche-Orient en passant par l'Ukraine et le Yémen, "le droit international humanitaire (DIH) est mis à rude épreuve", a estimé le chef du Département fédéral des affaires étrangères.
Ni le multilatéralisme, ni le DIH "n'ont été capables d'empêcher" ces conflits et "encore moins de les résoudre", a-t-il ajouté devant les Etats de l'organe le plus puissant du système international mais aussi les ambassadeurs à Genève des autres pays membres de l'ONU.
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Les 75 ans des Conventions de Genève donnent une "occasion de réaffirmer nos responsabilités communes" face à un accord qui a sauvé des "millions de personnes". Le DIH est "ignoré, relativisé et parfois instrumentalisé", a déploré le conseiller fédéral en notant qu'"il y a beaucoup de guerres dans lesquelles ce droit n'est pas respecté".
Nos voix doivent être assez puissantes pour qu'elles résonnent jusque sur les champs de bataille
"Nos voix doivent être assez puissantes pour qu'elles résonnent jusque sur les champs de bataille", a-t-il encore dit. Il a rappelé que la Suisse avait fait approuver par le Conseil en mai dernier une résolution pour la protection du personnel humanitaire, conformément aux Conventions de Genève.
Et son homologue de la Sierra Leone Timothy Musa Kabba, dont le pays préside le Conseil pour août, a lui rappelé qu'il avait été enfant soldat. "Je ne serai pas la personne que je suis sans le soutien du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et de la communauté internationale", a-t-il dit devant les participants à la discussion organisée au Palais des Nations.
Sans la Russie
"Il n'y a aucune raison de célébrer" cet anniversaire, a insisté de son côté la présidente du CICR Mirjana Spoljaric. Elle a répété son appel lancé il y a deux semaines à faire du DIH une "priorité politique", une requête soutenue lundi par le conseiller fédéral. Et à une "volonté politique" pour l'application des Conventions de Genève et de leurs protocoles additionnels.
Parmi les quinze membres du Conseil, la Russie, fâchée avec Berne sur l'Ukraine, a décliné l'invitation, la considérant comme "une perte de temps". Les autres sont tous représentés, mais souvent seulement au niveau de leurs numéros deux à l'ONU à New York.
Dimanche, les membres du Conseil avaient visité la salle de l'Alabama à l'Hôtel de ville de Genève. Là où la première Convention de Genève de 1864 avait été signée.
La communauté internationale se retrouvera fin octobre pour la Conférence internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge. La Suisse souhaite oeuvrer activement pour la défense du DIH lors de cette réunion.
Les Conventions de Genève de 1949, ratifiées par les différents Etats, constituent de véritables lois de la guerre. Elles établissent des limites à ce qui est autorisé dans un conflit.
ats/vajo
Qu'est-ce que les Conventions de Genève?
Les Conventions de Genève, qui ont aussi établi les emblèmes humanitaires, protègent avant tout les personnes qui ne participent pas ou plus à des affrontements. Parmi celles-ci figurent les civils, le personnel humanitaire, les militaires mis hors de combat, les blessés ou les prisonniers de guerre.
Les quatre Conventions et les protocoles additionnels cherchent à empêcher ou punir les "infractions graves". Sont notamment interdites les attaques indiscriminées contre les civils, qui ont été, avec cet instrument, pour la première fois protégés par un accord international, contre les centres de santé ou contre les infrastructures civiles.
Les prisonniers de guerre doivent être retenus de manière humaine. Les Conventions règlent notamment les limites au travail des détenus, leurs ressources financières, l'absence de poursuites contre eux, leur libération et leur rapatriement une fois les hostilités terminées.
Ces accords ont imposé également les obligations d'une puissance occupante face à la population civile. De même que les secours humanitaires à garantir à celle-ci.
Comment les faire mieux respecter?
Pour Ignazio Cassis, deux choses peuvent être faites pour mieux faire respecter les normes: il faut "transposer ce droit international dans le droit national" et prendre en compte que "le monde change" et pour lequel "les normes" en vigueur "ne suffisent plus". Il donne l'exemple de l'IA qui contrôle les armes et des armées privées qui font la guerre.
En résumé, selon lui, il faut d'abord "appliquer les normes" car elles "ne le sont pas suffisamment".