En sondant les constructeurs pour préparer l'édition 2025 de la manifestation, "nous avions l'impression d'aller à l'encontre du marché", a expliqué vendredi Alexandre de Senarclens, le président de la fondation du Salon international de l'automobile de Genève.
Pourtant, l'édition 2024 du salon était prometteuse, souligne Sandro Mesquita, le directeur général de la manifestation. Après quatre ans d'absence en raison de la pandémie de Covid-19, les organisateurs étaient parvenus à réunir une trentaine d'exposants, 2000 journalistes et un nombreux public sous le toit de Palexpo.
L'objectif en 2025 était de faire deux fois mieux. Mais "les signaux que nous avons reçus ont été mauvais", relève Sandro Mesquita. D'importants constructeurs ont signifié aux organisateurs que le Salon de l'automobile de Genève n'entrait plus dans leur stratégie, ou qu'ils n'avaient pas de nouveautés à présenter.
Une énorme pression sur les constructeurs
L'industrie automobile est actuellement en pleine évolution, avec l'arrivée notamment de l'électromobilité et de la voiture autonome. De nouveaux acteurs se positionnent et mettent une pression énorme sur les constructeurs historiques, qui en sont déstabilisés, note Sandro Mesquita.
Le centre de gravité du marché se déplace en Asie. Le dernier salon automobile de Pékin a ainsi rassemblé tous les géants du secteur. En Europe, l'intérêt est moindre. Les salons de Munich et de Paris peuvent toutefois encore compter sur des constructeurs nationaux, alors que la "neutralité" genevoise s'est transformée en handicap.
Une perte pour le canton de Genève
Le canton de Genève perd aussi une manifestation incomparable. Palexpo a en effet été construit pour les besoins du Salon de l'automobile, a rappelé Alexandre de Senarclens. A son apogée, le grand rendez-vous annuel comptait 120 exposants. Il attirait 10'000 journalistes et 600'000 visiteurs. Beaucoup d'amateurs d'Outre-Sarine faisaient le "pèlerinage".
Le Salon international de l'automobile de Genève s'est hissé parmi les plus importants d'Europe dans le domaine. Il avait une réputation et une aura très importantes, note Sandro Mesquita. De nombreuses premières mondiales y ont été dévoilées. Il pouvait aussi s'enorgueillir de la présence de marques exclusives.
Genève devrait néanmoins toujours avoir son nom associé à l'automobile grâce au Geneva international Motor Show (GIMS) à Doha, au Qatar. La manifestation va poursuivre sa route, indique Sandro Mesquita. Le nom de Genève sera conservé, mais l'organisation de la manifestation passera aux mains des Qataris.
La conseillère d'Etat genevoise Delphine Bachmann, responsable du département de l'économie et de l'emploi (DEE), constate de son côté que le modèle économique des salons de l'auto a changé et "ne séduit plus suffisamment les constructeurs automobiles ni en Suisse ni en Europe".
La magistrate rappelle que Genève "reste une destination incontournable pour les salons internationaux". Elle cite notamment l'exemple du salon horloger Watches and Wonders, de notoriété internationale, dont les retombées économiques sont "comparables à celles des meilleures années du salon de l'auto".
>> Voir aussi la page sur le Salon de l'auto dans les archives de la RTS : Le Salon de l'automobile de Genève
ats/boi
"Un gros coup", pour Palexpo
"C'est un gros coup", a réagi le directeur général de Palexpo Claude Membrez, mais cette disparition de la manifestation était quelque part écrite. Le salon avait amorcé sa décrue bien avant la pandémie de Covid, à partir de 2015, a-t-il relevé. "Nous n'avons pas attendu toutes ces années pour attirer de nouveaux événements."
En 2011, Palexpo avait déjà enregistré la perte de Telecom, qui était aussi un gigantesque événement. Le centre d'exposition fonctionnera aussi sans le Salon de l'automobile.
Claude Membrez en veut pour preuve les comptes 2023, à l'équilibre, alors que le salon avait disparu des radars depuis quatre ans à la suite du Covid.