En 2014, le conseil d'administration de l'IMAD de l’époque réalise que sa directrice est moins bien payée que d'autres directeurs d'institutions subventionnées, comme les transports publics genevois (TPG) ou les services industriels (SIG). Il y voit une différence de traitement et une inégalité hommes-femmes. Il décide alors d'y remédier en lui accordant dès 2016 une prime mensuelle de 5000 francs sans demander l'accord du gouvernement. En 2021, l'affaire fait scandale et le Conseil d'Etat décide de geler les indemnités de la directrice de l'IMAD jusqu'à réévaluation du cahier des charges.
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Le conseil d'administration patiente mais insiste, ce qui crispe le Conseil d'Etat. En 2023, ce dernier accorde une augmentation au directeur des HUG, mais toujours pas à la directrice de l'IMAD.
Responsabilité d’employeur
Le conseil d’administration passe donc en force, conforté par plusieurs avis de droit. En juin 2023, alors que l’IMAD vient de changer de magistrat de tutelle, passant de Mauro Poggia à Pierre Maudet, il verse 170'000 francs d’indemnités à la directrice. Cette somme comprend des primes rétroactives et couvre au total les années 2021 à 2023. Elle s’ajoute à un salaire annuel de 250'000 francs.
Aux yeux des administrateurs et administratrices, il en va de leur responsabilité d'employeur. Ils comptent ainsi reconnaître les efforts de la directrice durant le Covid notamment et rétablir l’égalité vis-à-vis des homologues masculins de la directrice. Ils estiment aussi avoir assez attendu, d’autant plus qu’il était prévu dès l’embauche de la directrice il y a 10 ans qu’il y ait adaptation de son salaire.
Pas d’inégalité?
Du côté du Conseil d'Etat, ce n'est pas tant le principe de rémunérer davantage la directrice de l'IMAD qui dérange, mais la manière. Il souligne que le conseil d'administration s’est octroyé le droit d'augmenter son salaire à travers une prime alors que cette décision est du ressort du gouvernement.
Quant à la question de l'inégalité salariale, la conseillère d’Etat en charge des finances Nathalie Fontanet estime qu'il n'est pas pertinent de comparer le salaire de la directrice de l'IMAD à celui du directeur des TPG, était donné qu'il s'agit de secteurs d'activité différents. Il faudrait plutôt le mettre en parallèle avec celui du dirigeant de l'Hospice général, qui est presque équivalent.
L'ancien magistrat de tutelle de l'IMAD Mauro Poggia rejette lui la thèse d'une inégalité hommes-femmes. Il estime que ce n'est pas le manque de volonté qui a retardé la réévaluation du salaire de la directrice, mais l'attitude de l'ancien conseil d'administration, qui a selon lui manqué d'autocritique et de mea culpa après s'être fait épingler en 2021.
Avec cette nouvelle affaire, les fronts sont encore plus tendus entre l'IMAD et le Conseil d'Etat. De quoi compliquer les négociations sur la tant attendue réévaluation du cahier des charges, et du salaire qui va avec.
Anouk Pernet/vic