Rebecca Balestra adore brouiller les pistes. Sa dualité se reflète dans son travail artistique, où elle aime allier élégance et humour graveleux. Elle confie puiser son inspiration autant chez des icônes glamours comme Dalida et Barbra Streisand que chez des humoristes populaires tels que Mister Bean ou Marie-Thérèse Porchet.
Une personnalité pleine de contradictions que l'artiste genevoise assume totalement. "J'aime être à la fois élégante et charretière. J'aime la poésie comme j'aime l'humour trash (...) Cela fait partie de mon identité", confie-t-elle.
Cette double identité permet également à la chroniqueuse des Beaux parleurs de "déjouer les attentes". "On ne peut pas m'attraper, me catégoriser, me mettre dans une seule case. Cela me permet d'être hors catégorie."
"C'est parce que j'ai peur que je le fais"
De nature angoissée, Rebecca Balestra confie que c'est souvent dans la peur qu'elle puise ses ressources et trouve le courage d'avancer. "C'est parce que j'ai peur que je le fais. Je suis en procréation permanente parce que je suis terrorisée par l'idée de faire quelque chose. C'est très paradoxal. Je suis comme quelqu'un qui a le vertige, mais qui saute quand même", image-t-elle.
Les insultes sont un grand moteur de création. Dès qu'on insulte mon nez, j'ai envie de faire une diatribe dessus et d'en faire quelque chose de flamboyant
Et d'ajouter: "Ma chronique des Beaux parleurs est, par exemple, écrite des semaines à l'avance. J'ai tellement peur que je passe des nuits blanches devant mon ordinateur. Ça réveille mon mari, la lumière de l'écran sur mon visage déformé par l'angoisse. Tout cela pour trouver la meilleure façon d'insulter la chemise de Jonas Schneiter", glisse-t-elle.
Sacraliser puis désacraliser
Issue d'une famille genevoise, Rebecca a grandi entourée de costumes grâce à sa grand-mère couturière, à la tête de l'entreprise "Balestra Costumes" à Plainpalais. "J'ai grandi dans une famille où c'était normal et joyeux de se déguiser. J'ai vraiment gardé cette identité." L'artiste genevoise a également été fortement influencée par son grand-père, postier de métier et auteur de revues. "Il avait une plume splendide, il écrivait des poèmes", raconte-t-elle.
On me reproche d'être trop vulgaire, cette étiquette me colle à la peau
L'occasion pour Rebecca Balestra de revenir sur sa passion pour l'écriture, son moyen d'expression favori. "J'aime sacraliser les choses, les rendre belles et c'est là que la poésie entre en jeu. Par exemple, des costumes somptueux et scintillants peuvent être immédiatement désacralisés par une punchline (...) Pour moi, l'art ne peut exister sans cette dualité: il doit à la fois divertir, apporter quelque chose de drôle, tout en aspirant à la beauté, à la transcendance."
Des messages haineux qui ne la déstabilisent pas
Rebecca Balestra dit également observer une certaine forme de misogynie dans l'humour. "On me reproche souvent d'être trop vulgaire, c'est une étiquette qui me colle à la peau". Elle confie également recevoir chaque semaine des messages haineux, notamment sur sa voix, jugée "trop masculine". Des remarques qui ne suffisent pas à la déstabiliser, au contraire.
"Les insultes sont un grand moteur de création", sourit-elle, "dès qu'on insulte mon nez, j'ai envie de faire une diatribe dessus et d'en faire quelque chose de flamboyant".
Cette artiste touche-à-tout n'a pas le temps de s'ennuyer. Elle multiplie les projets en tout genre, dont la reprise de l'émission Les beaux parleurs, une lecture de Ramuz au Théâtre de Poche, la sortie de la série RTS "Espèces menacées" et la publication de son recueil de poésie "Minuit Soleil". Elle travaille également sur un album musical basé sur ses textes, qui est prévu pour l'automne.
Propos recueillis par Philippe Revaz
Article web: Hélène Krähenbühl