La RTS, ainsi que le Courrier et la Tribune de Genève, ont rencontré trois de ces jeunes, Karim, Nadim et José (prénoms d'emprunt). Âgés d’une vingtaine d’années, ils ont grandi à Thônex et pour eux, la place Graveson est LE lieu de socialisation. C’est là qu’ils retrouvent leurs amis, qu’ils écoutent de la musique ou qu’ils tournent des clips.
Mais parfois, l’accès à cette place leur est interdit. Si ces jeunes admettent ne pas être des anges, ils estiment que ces interdictions de périmètre sont souvent injustes.
"Qu’est-ce qui pourrait justifier une interdiction de trois mois de là où on habite? Je ne pense pas que ce soit le fait qu'on traîne, qu'on fasse un clip ou qu'on soit mal stationné", s'énerve José dans l'émission Forum. "Pour ce genre d’infraction, normalement, c’est des amendes, pas des interdictions de territoire".
Trouble de l’ordre public et sentiment d’insécurité
Ces mesures d’éloignement sont une sanction qui peut s'ajouter à une amende. Il s'agit d'un outil prévu par la Loi sur la police pour lutter contre des comportements qui troublent l’ordre public et créent un sentiment d’insécurité, tels que le deal de rue ou la mendicité, par exemple.
La personne concernée n'a plus le droit de se rendre au centre de la commune, dans une zone qui couvre la place Graveson et les bâtiments alentours, boulangerie, terrain de basket et piscine de Thônex incluse.
Le non-respect d'une interdiction de périmètre conduit à une amende, qui augmente en cas de récidive.
"Acharnement de la police"
A Thônex, ces interdictions se sont multipliées depuis le meurtre au couteau d’un jeune homme de 18 ans sur la place Graveson en mai 2023. A la suite de ce drame, la police municipale a augmenté le nombre de ses patrouilles, mais selon les jeunes du quartier, les agents municipaux s'acharnent sur eux.
"Ils arrivent et commencent à nous manquer de respect: 'dégagez, vous n'avez rien à faire ici. Si on revient vous allez avoir des bûches'", affirme Karim. "Ils nous mettent la pression pour plus qu'on ne traîne là, alors que ça fait plus de 15 ans qu'on le fait. Et si on ne traîne plus là, je ne sais plus où traîner".
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"Ce qu'il faut bien comprendre dans le contexte de ces mesures d'éloignement, c'est que nous sommes dans une volonté de pacifier une zone qui a vécu en 2023 un horrible fait divers", indique de son côté Marc Kilcher, conseiller administratif de la ville de Thônex en charge de la sécurité et de la jeunesse.
"Nous avons 1200 habitants dans le quartier qui sont en état d'alerte, qui n'en peuvent plus du bruit généré par ces jeunes et d'un sentiment général de déprédation", poursuit-il. "Je pense que l'on a plutôt une problématique à lier au bien vivre ensemble et pas réellement une problématique de harcèlement des jeunes".
Depuis 2024, la commune de Thônex a pris des mesures afin d'apaiser le quartier, renforçant la sensibilisation dans les écoles et offrant un soutien aux familles pour l'encadrement de leurs enfants notamment. Marc Kilcher estime donc que les sanctions prises ne sont pas disproportionnées. Elles concernent par ailleurs "toujours les mêmes personnes qui sont constamment constatées en infraction".
Sujet radio: Julien Chiffelle
Adaptation web: Emilie Délétroz