La pilule passe mal auprès de certains assurés qui ont souscrit une complémentaire auprès du Groupe Mutuel. Dès le 1er mai, l'assureur ne remboursera plus leur séjour en division privée ou semi-privée à l'Hôpital de La Tour à Meyrin (GE), nous apprenait samedi La Tribune de Genève.
>> Lire à ce sujet : Le Groupe Mutuel ne remboursera plus les séjours privés et semi-privés à l'Hôpital de La Tour
En cause: l'échec des négociations entamées en automne dernier entre le Groupe Mutuel et l'établissement hospitalier. Ce sont notamment les montants des prestations cliniques (soit les à-côtés qui ne sont pas liés à un acte médical pur) et le confort hôtelier qui ont posé problème, selon l'assureur. Du côté de l'Hôpital de la Tour, on estime que cette décision impacte environ 1200 patients genevois chaque année.
On paie toute sa vie, sans savoir ce qu'on va obtenir ou pas
"Pour les patients, c'est extrêmement dur", souligne Baptiste Hurni, président de la section romande de la Fédération suisse des patients, interviewé dimanche dans Forum. Il se dit "extrêmement préoccupé".
"On paie toute sa vie, sans savoir ce qu'on va obtenir ou pas", résume le conseiller aux Etats (PS/NE). "Toute une série de patients prennent une assurance complémentaire pour être soignés dans un hôpital particulier de leur canton, comme ici avec La Tour", observe-t-il. Et soudain, ils se retrouvent exclus.
Prestations pas garanties
Des négociations ont en effet lieu chaque année et il peut arriver que les deux parties ne parviennent pas à se mettre d’accord. Ce cas n'est pas une première. Baptiste Hurni mentionne notamment un cas, parmi d'autres, dans le canton de Neuchâtel, impliquant Assura et l'hôpital de La Providence.
D'année en année, les prestations peuvent donc potentiellement diminuer. La prime des assurés, elle, ne baisse pas pour autant. Peut-on alors se retourner contre son assurance?
Malheureusement non, car "toutes les conditions générales (...) sont les mêmes", explique Baptiste Hurni. Il est en général écrit noir sur blanc qu'il peut y avoir des changements chaque année. "Et c'est parfaitement légal", relève le Neuchâtelois. Légal mais "choquant", selon lui.
"Plus de transparence"
L'élu socialiste est convaincu qu'il faudrait "plus de transparence" dans ce domaine dans l'intérêt des assurés.
L'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA), qui est compétente pour la surveillance des assurances maladie complémentaires, a "tiré la sonnette d'alarme" en 2020, souligne Baptiste Hurni, pour prévenir que "l'opacité et les surfacturations étaient la règle".
Car la facture peut être très différente pour un même soin prodigué en clinique privée. Pour la pose d'une prothèse de la hanche, l'assurance de base rembourse environ 16'000 francs. Et c'est ce que facture un hôpital public. Dans le privé, cette même opération peut coûter entre 17'500 et 41'000 francs. La différence est couverte par l'assurance complémentaire.
La loi donne pourtant peu de pouvoir à la FINMA, assure le conseiller aux Etats, qui estime que l'autorité "fait ce qu'elle peut et émet des recommandations".
Montants tenus secrets
Avec le cadre légal actuel, la complémentaire est "par définition" une assurance privée avant tout. Les accords négociés (ou refusés) et les montants restent donc secrets.
En effet, pour une même opération et un même service d'hôtellerie, la clinique facturera un prix différent en fonction du type d'assurance complémentaire en raison des accords renégociés chaque année.
Voilà par exemple pourquoi la CSS accepte aujourd'hui à Genève de payer l'hospitalisation privée à l'hôpital de la Tour, mais pas aux Grangettes, ni à la clinique de la Colline.
"Vous savez, j'ai déjà de la peine à faire entendre raison à mes collègues de droite sur les contrôles qui concernent l'assurance de base. Alors si je commence à leur parler de l'assurance complémentaire, je pense qu'ils font tous une syncope", conclut Baptiste Hurni.
Propos recueillis par Mehmet Gultas
Sujet TV: Julie Conti et Cédric Jordan
Adaptation web: doe