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Risque de pénurie d'enseignants à Genève à cause des retraites anticipées

Dans le canton de Vaud, les enseignants spécialisés du secteur privé tirent la sonnette d'alarme. [Georgios Kefalas]
Engager des étudiants, recruter à l'étranger ou augmenter le nombre d'élèves par classe sont des solutions évoquées pour juguler la pénurie d'enseignants. - [Georgios Kefalas]
L'école genevoise risque de perdre 700 enseignants sur 6600 cette année, a appris la RTS. En cause, l'augmentation du nombre de retraites anticipées.

Une bombe à retardement menace l'école genevoise. A la rentrée, le Département de l'instruction publique (DIP) risque de souffrir des départs massifs d'enseignants à la retraite anticipée. Comme l’a appris la RTS, 700 enseignants sur un effectif de 6600 ont droit à la préretraite et risquent de brutalement plier bagage cette année. Ceci en plus des 60 départs naturels à la retraite.

Plusieurs facteurs pourraient les y inciter. "Nous vivons une situation politique instable: le budget du canton n'est toujours pas sous toit, un projet de loi supprimant la préretraite a été déposé, et enfin, on attend l’issue du scrutin du 3 mars sur l'avenir des caisses de pension (lire encadré)", explique Charles Beer, conseiller d'Etat chargé de l'Instruction publique, qui craint un "chaos" si le scénario catastrophe se concrétisait.

Les étudiants comme solution

En cas de départs massifs avérés, le Département de l'instruction publique appliquera son plan pour pallier la pénurie, notamment au degré secondaire, particulièrement touché dans trois branches: l'allemand, les mathématiques et la physique.

Des étudiants en fin de cursus se verraient offrir des stages en emploi, des retraités pourraient rester deux ans de plus et le Conseil d'Etat pourrait même refuser des départs anticipés, ce qui serait sans précédent dans le canton.

Recrutement hors de Genève

Le syndicat du primaire espère que la qualité de la formation n'en pâtira pas, souligne son président Laurent Vité: "Notre crainte, c'est qu'on commence comme à Fribourg à engager des gens qui n'ont soit pas terminé, soit raté leurs études."

Mais la première mesure prévue par Charles Beer est le recrutement d'enseignants hors de Genève: "Quitte à faire de la peine aux populistes, il faudra aller au-delà de la Versoix et embrasser l'ensemble du monde francophone pour recruter à un large niveau."

Une solution qui permettrait d'éviter le pire: "’ultime plan catastrophe serait de devoir restreindre les enseignements ou d'augmenter le nombre d'élèves par classe", selon le magistrat.

L'enseignement n'est pas le seul à être touché par la question brûlante des pré-retraites: tous les services de l'Etat sont confrontés au problème.

Cynthia Gani/vkiss

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Votation du 3 mars en cause

Un des éléments majeurs du risque d'hémorragie d'enseignants est le scrutin du 3 mars. Les Genevois se prononceront sur la fusion des caisses de retraite publiques. Le président du syndicat des enseignants du primaire, Laurent Vité, est favorable à la fusion, mais relève toutefois la péjoration des retraites des enseignants.

"Si la fusion est acceptée, l'âge de rente pleine possible passera de 62 a 64 ans, le nouveau plan prévoit de passer de 38 à 40 ans de cotisations et la rente est fixée à 60% du traitement assuré, alors qu'actuellement elle est à 75% du traitement assuré. Il s'agit donc de payer plus, plus longtemps, pour des rentes moins intéressantes."

Au 1er février, 270 demandes de départ anticipés ont été déposées au DIP, mais le chiffre va augmenter. Un délai spécial a été fixé au 22 mars pour permettre aux enseignants en âge de prendre leur retraite anticipée de se déterminer après la votation du 3 mars.

Dans l'intervalle, Laurent Vité conseille les nombreux enseignants qui l'appellent au cas par cas: "Quand c'est très anticipé, je leur conseille de bien réfléchir aux conséquences, car ils risquent d'avoir des pénalités importantes. Mais quand ils sont proches de la retraite avec une rente pleine à 62 ans, j'ai tendance à leur préconiser de partir."