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Le centre de La Pâquerette avait pris trop de liberté, selon l'enquête

Remise en question de la capacité des élus d'un parlement à résoudre une enquête complexe suite à l'affaire Adeline. [RTS]
Un rapport très critique sort cinq ans après l'affaire Adeline / 19h30 / 2 min. / le 18 avril 2018
A Genève, la commission d'enquête parlementaire créée pour faire la lumière sur les circonstances ayant conduit à l'assassinat d'Adeline a publié son rapport mercredi. Elle critique la trop grande autonomie prise par La Pâquerette.

La commission d'enquête parlementaire (CEP) a notamment décortiqué le fonctionnement de La Pâquerette, le centre de réinsertion de détenus dangereux où travaillait Adeline jusqu'à son assassinat en septembre 2013.

Le rapport de 177 pages retrace toute l'histoire de l'unité et relève, qu'au fil du temps, la structure s'est déconnectée du reste de l'administration. L'enquête "a révélé un fonctionnement moins idyllique que le tableau qui en était fait jusqu'à la survenance du drame, (...) avec un effacement progressif des autorités de tutelle".

La situation du centre de La Pâquerette posait en elle-même des problèmes. La structure relevait des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), tout en se trouvant dans la prison de Champ-Dollon. Cette intégration a "été source de nombreux conflits entre les deux administrations", l'une exigeant le respect des règles de sécurité en milieu carcéral, l'autre militant pour un environnement moins rigide et surveillé.

"Un fonctionnement autarcique"

"A cela s'est ajouté un rattachement hiérarchique différent des deux directions avec, soit une absence de décisions de l'autorité politique pour trancher les différends, soit une confirmation des options prises par la direction de La Pâquerette", a estimé la CEP. "Avec le temps, le centre a évolué vers un fonctionnement autarcique, largement déconnecté du système."

Certains incidents au sein de la structure auraient mérité d'être mieux analysés, a noté mercredi devant les médias le député UDC Thomas Bläsi, coauteur du rapport avec son collègue socialiste Roger Deneys.

Ils préfiguraient pourtant le drame qui allait arriver, a souligné l'élu. Des personnes avaient tiré la sonnette d'alarme, notamment en matière de sorties accompagnées, mais il n'a pas été tenu compte de leur avis.

N'écarter aucune piste

"Notre travail n'était pas de désigner des responsables", a ajouté Thomas Bläsi. La CEP n'a voulu écarter aucune piste et ne s'est pas focalisée sur un service de l'Etat en particulier, comme ont pu le faire d'autres rapports sur le drame.

La CEP a eu besoin de trois ans de travaux avant de publier son rapport. "Nous avons parfois eu accès tardivement à certains documents", s'est justifié son président, le MCG Jean-Marie Voumard. Les commissaires estiment que l'attente n'a pas été inutile. Des éléments sur l'affaire ne figurent dans aucun autre rapport.

Pour le Conseil d'Etat, le rapport de la CEP confirme ceux établis en octobre 2013 et en février 2014, à sa demande, par l'ex-ministre Bernard Ziegler et dont les recommandations se rejoignent. "Les mesures concrètes nécessaires ont été prises rapidement et déploient leurs effets, notamment pour ce qui est de l'évaluation des détenus dangereux", a souligné mercredi le conseiller d'Etat Pierre Maudet.

>> Les précisions d’Elsa Anghinolfi :

Affaire Adeline - Commission d’enquête: les précisions d’Elsa Anghinolfi, depuis Genève
Affaire Adeline / Commission d’enquête: les précisions d’Elsa Anghinolfi, depuis Genève / 12h45 / 48 sec. / le 18 avril 2018

ats/tmun

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Mission de préparation à la libération des détenus dangereux

L'unité de La Pâquerette, fermée depuis le drame, était située au sein de la prison de Champ-Dollon dans le canton de Genève. Elle avait pour mission de préparer à leur libération des détenus dangereux incarcérés depuis de nombreuses années. Des sorties accompagnées étaient notamment organisées.

C'est au cours de l'une d'elles qu'Adeline, sociothérapeute à La Pâquerette, a été égorgée en septembre 2013 par Fabrice A. Condamné à 20 ans de prison pour deux viols, l'homme était détenu dans l'unité, au sein de laquelle il lui avait été accordé de participer à un programme d'"équithérapie". En mai 2017, Fabrice A. a été condamné à la réclusion à vie et à l'internement ordinaire pour l'assassinat d'Adeline.

Avant la CEP, quatre rapports avaient déjà été rédigés sur l'assassinat d'Adeline. Deux ont été faits à la demande du gouvernement genevois, un autre, des HUG, portait sur la directrice de La Pâquerette et enfin le dernier concernait la directrice du Service d'application des peines et des mesures (SAPEM).