La tête de moine est presque millénaire, mais jusqu'à l'aube des années 1980, sa dégustation se méritait. "Cela se faisait avec un couteau plat. C'était fastidieux. Ce n'était pas évident, parce qu'il fallait parfois contenter toute une tablée. En principe, c'était vraiment le pater familias ou quelqu'un d'autorisé qui râpait la tête de moine", raconte Gérard Crevoisier, fils de l'inventeur de la girolle Nicolas Crevoisier, jeudi dans Couleurs locales.
Inventeur d'un "sacré truc"
Nicolas Crevoisier réalise que le couteau et le racloir sont dépassés. La tête de moine est ronde. La lame sera donc circulaire et tournera autour d'un axe en acier placé sur une planche d'érable, ce qui permet à la tête de moine de se déguster en fines dentelles appelées "rosettes".
En 2012, il confiait à la RSR être conscient d'avoir trouvé "un sacré truc", auquel il ne manquait qu'un nom. Il le voulait "moderne et qui passe bien à l'oreille". A table, sa fille aînée, observant la ressemblance entre les rosettes et des chanterelles, lui propose "la girolle". Il la fera breveter en 1982.
Un an plus tard, il déclarera à Temps présent: "C'est le gros boom! Je leur ai apporté, à ces messieurs les fabricants, un truc qu'ils attendaient depuis longtemps. Et ils se frottent les mains, croyez-moi!"
De 200 à 3000 tonnes par an
Et le temps lui a donné raison, puisque de 200 tonnes annuelles vendues en 1980, exclusivement en Suisse, on est passé aujourd'hui à 3000 tonnes, dont les deux tiers sont exportés à l'étranger.
"C'est le big bang! L'ingéniosité, la créativité de Nicolas Crevoisier... La girolle a changé la donne, c'est génial!", s'exclame Jacques Gygax, président de l'Interprofession de la tête de moine. "C'est devenu ludique, tout est plus facile, on tourne. C'est pratiquement un jeu d'enfant!" Quant à la girolle, près de 3 millions de pièces ont déjà été vendues depuis.
Malgré ses quatre décennies d'existence, la girolle continue d'évoluer. "Depuis deux ans, nous avons un nouveau produit avec un bois FSC certifié qui nous permet d'avoir une traçabilité de l'abattage de l'arbre à l'arrivée dans nos locaux", explique le directeur général de Métafil-Lagriolle Pierre Rom. "Nous avons aussi éliminé tout le plastique que nous avons converti par des PET recyclables, les cartons aussi."
Olivier Kurth/vajo