La Ville de Moutier s'est réveillée jurassienne lundi matin après l'historique vote qui a vu la population décider le changement de canton par 51,7% des voix, mais elle n'est pas encore jurassienne dans les faits.
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Il ne faut en premier lieu pas oublier les 1930 personnes qui ont glissé un non dans l'urne (contre 2067 oui) et le Gouvernement jurassien l'a rappelé dès l'annonce du résultat, affirmant qu'il respectait leur décision, mais ajoutant qu'il fallait désormais tourner la page, passer à une "communauté unie".
Le Conseil-exécutif bernois a lui aussi appelé son homologue à tenir compte de la minorité qui aurait préféré le statu quo. Le Jura devra apprendre à vivre avec des personnes qui auraient préféré un autre sort. Le gouvernement bernois compte sur la bienveillance jurassienne à leur égard, écrit-il.
Pas encore Moutier (JU)
Concrètement, ce oui ne signifie pas que Moutier est une ville jurassienne dès à présent. Plusieurs étapes doivent encore être franchies pour que Moutier (JU) soit une réalité, et notamment plusieurs passages par les urnes.
Le premier vote ne concernera pas directement Moutier, mais deux autres communes du Jura bernois. Belprahon et Sorvilier doivent décider dans les urnes le 17 septembre prochain s'ils rejoignent aussi le Jura.
Au terme de ces consultations populaires, les cantons de Berne et du Jura devront négocier un concordat intercantonal réglant les détails du transfert de souveraineté et des modifications territoriales. Ce texte devra être ratifié par le Grand Conseil bernois et le Parlement jurassien fin 2018.
Bernois et Jurassiens aux urnes en 2019
Les citoyens des deux cantons cantons seront ensuite appelés aux urnes, le même jour, pour se prononcer sur ce concordat, au 1er trimestre 2019 selon le calendrier du Gouvernement jurassien. Si le non devait l'emporter à Berne ou dans le Jura, Moutier et les éventuelles autres communes resteraient bernoises avec les problèmes évidents que cela générerait dans le camp du oui.
En cas de double oui, le dossier sera transmis aux Chambres fédérales réunies qui se prononceront par le biais d'un arrêté sur la modification territoriale. La population suisse ne serait pas appelée aux urnes, comme cela avait été la cas en mars 1996 pour le transfert de Vellerat dans le Jura.
Alors seront engagées les discussions entre les deux cantons pour le partage des biens, notamment certains bâtiments qui appartiennent au canton de Berne.
Entrée en vigueur prévue en 2021
Une dernière votation devrait être organisée dans le Jura en 2020, afin de valider les modifications de la Constitution jurassienne découlant de la création d'un quatrième district.
Au final, la modification territoriale devrait entrer en vigueur au 1er janvier 2021, après la tenue d'élections générales incluant le nouveau corps électoral jurassien dans son ensemble à fin 2020.
Frédéric Boillat
St-Imier devient la plus grande ville
Avec le départ de Moutier et ses 7700 habitants, le Jura bernois perd environ 14% de sa population.
St-Imier devient désormais la plus grande ville du Jura bernois avec un peu plus de 5000 habitants.
Un nouveau recours
Un nouveau recours est arrivé lundi auprès de la préfecture du Jura bernois en relation avec le vote de Moutier. Il a été envoyé le 16 juin, soit avant le résultat du vote. La suppléante du préfet du Jura bernois Stéphanie Niederhauser n'a pas souhaité donner davantage de détail sur ce nouveau recours, en particulier de qui il émanait.
Elle a confirmé que la justice était à présent saisie de quatre recours. Les premiers recours ont été déposés par des partisans du maintien de Moutier dans le canton de Berne. L'examen des plaintes peut, dans le meilleur des cas, prendre deux à trois mois. Mais en général, la procédure prend bien davantage de temps, a expliqué Stéphanie Niederhauser.
La semaine dernière, le préfet avait informé le Ministère public des allégations concernant le monnayage de votes. Ce fait, s'il devait être avéré, tomberait sous le coup du Code pénal.