"Cette initiative a le mérite de mettre en lumière les enjeux importants qui existent en matière de santé bucco-dentaire pour nombre de personnes. Des inégalités existent dans l'accès aux soins, pour des motifs économiques", a reconnu Laurent Kurth, conseiller d'État.
"L'initiative impliquerait toutefois le déploiement de ressources qui ne sont pas envisageables dans le contexte socio-économique actuel, ce d’autant que les sources de financement proposées par les initiants ne peuvent pas être retenues car sans lien avec le marché du travail", a ajouté Laurent Kurth. Le conseiller d'Etat a rappelé que des refus ont déjà été enregistrés récemment par la population dans les cantons de Vaud et de Genève.
Dépistage pour les tout petits
L'initiative constitutionnelle "Pour une assurance des soins dentaires" demande que l'Etat institue une assurance obligatoire - avec prélèvement sur la masse salariale comme l'AVS - qui prendrait en charge les soins dentaires de base et les contrôles périodiques.
Dans son contre-projet, le gouvernement propose un programme de santé publique bucco-dentaire. Ce dernier serait "ciblé sur les besoins les plus marqués de la population", a expliqué Laurent Kurth. Le dépistage annuel gratuit des enfants de trois à cinq ans est prévu. Pour 2000 enfants par année dans le canton, les coûts d’une telle mesure sont évalués à 650'000 francs.
Taxer les boissons sucrées
Le gouvernement veut aussi soutenir les communes pour harmoniser les subventionnements en soins dentaires au sein de l’école obligatoire. Si le canton devait suivre l’exemple du Valais, qui subventionne au travers des communes 40% des soins dentaires et l’orthodontie de 0 à 15 ans, le coût d’une telle mesure correspondrait à 3,2 millions de francs, dont il faudrait soustraire les montants déjà octroyés par certaines communes.
Le Conseil d’Etat propose de financer le programme par une taxe sur les boissons sucrées, car il y a "un large consensus sur les effets néfastes, notamment sur les dents". Cette dernière serait conçue sur le même modèle que la taxe sur les boissons alcoolisées.
15 centimes par litre
Le montant de la redevance - perçue annuellement - serait fixé en pourcentage du chiffre d’affaires réalisé par la vente des boissons sucrées de chaque commerce. La taxe se monterait à 15 centimes le litre. L’introduction de cette redevance coûterait en moyenne un franc par mois et par personne.
La redevance pour les établissements publics ne serait pas fixée en fonction du chiffre d'affaires mais serait prélevée via une taxe annuelle. Elle se monterait au maximum à 600 francs. Pour les manifestations publiques, une taxe journalière serait introduite. Elle se monterait au maximum à 500 francs par jour pour les très grands événements, comme la Fête des vendanges.
Mais les restaurateurs, par la voix de GastroNeuchâtel, et les grandes surfaces, représentés par la Communauté d'intérêt du commerce de détail suisse, se montrent opposés au principe.
Recettes de 2 millions
Les recettes annuelles liées à cette redevance atteindraient un peu plus de 2 millions de francs pour 2022 et 2023. Elles seront versées dans un fonds et dédiées pour le programme.
La mise en oeuvre du programme en matière de prévention et soins en santé bucco-dentaire nécessitera l’engagement d’un médecin-dentiste cantonal et de collaborateurs dédiés. Dix-sept cantons et un demi-canton ont en déjà un en Suisse, a expliqué Véronique Clivaz, cheffe de projet.
Le contre-projet indirect est mis en consultation jusqu'au 6 mars. Le gouvernement espère un retrait de l'initiative au profit de son texte.
ats/kkub