"La Ville de Neuchâtel veut faire toute la lumière sur son passé, y compris les zones d'ombre", a indiqué ce mercredi à Neuchâtel sa présidente Violaine Blétry-de Montmollin. Après avoir reçu deux pétitions concernant le sort de la statue, elle répond ainsi à leurs auteurs par un rapport d'information qui sera présenté le 6 septembre au Conseil général.
Ce rapport prévoit un programme d'action à court, moyen et long terme en réponse aux événements internationaux survenus il y a un peu plus d'un an. Il vise à mieux faire connaître les marques mémorielles présentes dans les rues, tout en luttant activement contre les discriminations.
Assumer l'histoire "y compris les facettes sombres"
"La démarche apporte des réponses nuancées et équilibrées", a expliqué Thomas Facchinetti, conseiller communal en charge du dossier. Un groupe de travail a planché sur celui-ci pendant un an.
Ils ont écouté les pétitionnaires, les communautés afro-descendantes et les autres acteurs et actrices concernés pour mieux comprendre leurs motivations et trouver des réponses adéquates.
Pour rappel, dans la nuit du 12 au 13 juillet 2020, la statue de bronze de David de Pury avait été maculée de peinture rouge. Une première pétition exigeait son démontage, alors qu'une seconde demandait a contrario son maintien, assorti d'une plaque explicative.
"La volonté de trouver une position commune et concertée illustre le sérieux avec lequel nous considérons ces problématiques", a insisté Violaine Blétry-de Montmollin.
"Il s'agit d'assumer les héritages historiques, y compris les aspérités et les facettes sombres ou contestables des marques mémorielles présentes dans l'espace public, tout en rendant largement accessibles les nouvelles connaissances historiques", a résumé Mireille Tissot-Daguette, présidente de la commission ad hoc.
Une plaque pour raconter l'histoire
Une plaque sera donc installée l'an prochain devant la statue. Le texte a été travaillé et remanié à plusieurs reprises par le comité de pilotage "Mémoire et espace public", avec la volonté d'allier précision et concision.
La version finale, qui se déploie en quatre paragraphes, a été agréée par toutes les parties. Le texte sera traduit en anglais et allemand.
Dans la rédaction, l'équilibre a été recherché pour rendre à la fois une humanité aux personnes réduites en esclavage et ne pas accuser David de Pury de faits historiquement non avérés. L'idée est de remettre les éléments dans un contexte économique plus large.
A proximité du monument, plusieurs installations visuelles ou sonores sont prévues. Un code QR renverra à des informations plus détaillées et à la recherche.
Des plaques figureront ultérieurement sur des bâtiments de la ville, dont les anciens propriétaires sont liés au commerce triangulaire, à l'esclavage ou à l'abolitionnisme.
Réaménager les places dans toute la ville
A moyen et long terme, Neuchâtel entend aussi soutenir et valoriser la recherche historique. Elle mettra notamment sur pied un parcours pédagogique multimédia intitulé "Neuchâtel, passé colonial".
Dans un registre similaire, le Conseil communal avait décidé en 2018 de reconsidérer, parmi les nombreux hommages rendus en ville de Neuchâtel à Louis Agassiz, scientifique de renom, le nom d'une place qui lui était dédiée, en le cédant à Tilo Frey. Cette dernière a été en 1971 la première femme du canton élue au parlement fédéral.
ats/aps
Pourquoi David de Pury dérange?
David de Pury (1709-1786) était un négociant neuchâtelois établi à Lisbonne. A sa mort, l'homme, qui doit en partie sa fortune à l’exploitation d’esclaves, lègue à sa ville natale une fortune considérable qui a permis la construction de plusieurs bâtiments emblématiques du chef-lieu cantonal.