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Les communes du Haut-Plateau (VS) accusées "d'obstruction" à l'information

Les remontées mécaniques à Crans-Montana. [Keystone - Jean-Christophe Bott]
Les communes de Crans-Montana accusées d'"obstruction" à l'information / Forum / 3 min. / le 4 décembre 2018
Malgré une médiation et plusieurs sommations, les communes de Crans-Montana, Lens et Icogne persistent à garder secrets des rapports sur les comptes de la société de remontées mécaniques CMA. Une omerta qui cacherait des soupçons d’infractions pénales.

Deux rapports remis aux communes valaisannes de Crans-Montana, Lens et Icogne évoqueraient des soupçons d’infractions pénales en lien avec la recapitalisation des remontées mécaniques de Crans-Montana-Aminona (CMA).

Le Matin Dimanche a récemment relayé ces soupçons de malversations et plusieurs médias, dont la RTS, ont cherché ces dernières semaines à se procurer les documents, sans succès à ce jour.

Et ce, malgré une médiation et les sommations adressées aux communes par le préposé cantonal valaisan à la protection des données et à la transparence, Sébastien Fanti.

Ces rapports, et peut-être aussi leurs cinq classeurs fédéraux d’annexes, cachent "probablement des choses que les communes ne voulaient ou ne pensaient pas trouver", ont confié plusieurs personnes sur le Haut-Plateau sous le couvert de l’anonymat.

Les communes ont clairement fait obstruction jusqu’ici.

Sébastien Fanti

Sébastien Fanti, qui n'a pas encore reçu non plus ces annexes qu'il réclame, a rendu vendredi une recommandation dont la version complète est parvenue mardi après-midi aux médias qui avaient demandé sa médiation. Les communes y sont invitées à leur remettre sans délai les rapports.

Dans sa recommandation, le préposé écrit que l'argument avancé par les communes pour refuser la publication des deux rapports, à savoir qu'une négociation est en cours, "confine à la témérité" et "relève d'une mauvaise foi crasse".

Un extrait de la recommandation de Sébastien Fanti adressée aux médias concernés et aux communes de Crans-Montana.
Un extrait de la recommandation de Sébastien Fanti adressée aux médias concernés et aux communes de Crans-Montana.

Actuellement, le préposé cantonal investigue pour savoir si une stratégie a été mise en place par lesdites communes pour éviter la publication.

"Elles ont clairement fait obstruction jusqu’ici. Il ne m’a pas été possible notamment de connaître l’identité de toutes les personnes ayant eu accès aux documents", écrit dans son argumentaire Sébastien Fanti.

Ce dernier dispose du total soutien de la commission du Grand Conseil qui le supervise, confirme son président Sébastien Nendaz.

Les médias pourraient ne jamais voir les rapports

Le Ministère public valaisan a ouvert une enquête préliminaire pour vérifier si la recapitalisation de CMA a pu être entachée d'infractions pénales.

Le procureur général Nicolas Dubuis a réclamé les rapports aux communes qui se sont empressées de les lui remettre, il l'a confirmé.

Or, cette remise des documents est intervenue en pleine médiation entre les communes et les journalistes. Ces derniers pourraient, en conséquence, ne jamais les obtenir dans la mesure où le code de procédure pénale prendrait le pas sur la Loi sur l’information du public, la protection des données et l’archivage (LIPDA).

Certains se demandent dès lors si les communes n'auraient pas sciemment "joué la montre". La concrétisation de l’accord pour sauver les remontées mécaniques de Crans-Montana-Aminona, dont les finances ne sont pas au mieux, est imminente entre les communes et l’actionnaire majoritaire, le milliardaire tchèque Radovan Vitek.

Les communes pourraient vouloir attendre que ce dernier passe à la caisse et que la pression retombe.

"Ambiance délétère"

Radovan Vitek va justement rencontrer jeudi soir la population du Haut-Plateau à Crans-Montana en présence des représentants des trois communes, au cours d’une séance d’information sur le thème "L’avenir de CMA".

Difficile en l’état d’imaginer à quoi ressemblera la rencontre. En revanche, au cours de cette enquête plusieurs personnes ont parlé "d’ambiance délétère, de chape de plomb, de pressions et menaces et même de règne de la peur", craignant pour l’image désastreuse donnée de la station à travers cette affaire.

Yves Terrani / ptur

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