L’affaire a été révélée en novembre 2013 par Oskar Freysinger, alors conseiller d’Etat en charge des Ecoles. Dans son communiqué de six lignes, le magistrat écrivait avoir "été averti d’un problème impliquant un enseignant et plusieurs élèves au Centre scolaire de Beaulieu à Sierre".
L'acte d’accusation de sept pages lève le voile sur les actes reprochés au prévenu: il y a d’abord des actes de voyeurisme dans les vestiaires de l’école. L’enseignant reconnaît avoir eu des érections en observant plusieurs élèves, des filles âgées de 9 à 12 ans à l’époque des faits. Il reconnaît aussi s’être masturbé dans un local réservé aux enseignants.
Deux ans de silence
Selon le Ministère public, l’enseignant a commis d’autres actes d’ordre sexuel, plus graves. Il aurait profité d’une dégustation de fruits à l’aveugle, en classe, pour mettre son sexe dans la bouche de plusieurs élèves. Le prévenu conteste avoir agi de la sorte.
Les faits qui lui sont reprochés auraient donc duré deux ans, entre 2011 et 2013, mais personne n’était au courant. Aucune victime ne s’était plainte à l’école. Pour le psychologue Philip Jaffé, membre du Comité des droits de l’enfant de l’ONU, ce n’est pas surprenant.
"L’agresseur était une personne de confiance. Pour un élève, il est très difficile de passer outre ce lien avec ce type de personnage, il est très difficile d’en parler en dehors", explique-t-il dans le 19h30. Philip Jaffé ajoute qu’avant l’adolescence, "beaucoup d’enfants ont des difficultés à dévoiler ce qu’il s’est passé parce qu’ils ont l’impression d’avoir fait quelque chose de sale eux-mêmes".
A l’époque, une victime a raconté à sa maman ce qu’elle avait subi, mais cette dernière ne l’a pas crue. Me Laurence Casays, avocate de cette enfant, donne un conseil à tous les parents: "Il est essentiel d’écouter la parole de l’enfant. Si un enfant raconte ce type de choses, c’est qu’il y a un fondement. Il ne faut pas rester dans cette culture du secret qui est tragique pour tout le monde."
Casier judiciaire
Le conseiller d’Etat Christophe Darbellay, qui a succédé à Oskar Freysinger à la tête des Ecoles, n’était pas encore élu à l’époque des faits. Il assure collaborer au sein de la Conférence suisse des directeurs cantonaux de l’Instruction publique "afin de prévenir au mieux les affaires de ce type."
Il précise que "nous n’engageons plus personne sans un extrait de casier judiciaire. Nous travaillons actuellement avec les autorités judiciaires et policières sur un durcissement, en particulier au travers de mesures qui permettraient de mieux appréhender les enquêtes en cours, d’effectuer des contrôles des remplaçants et de toute personne en contact avec les enfants au sein de l’école."
Christophe Darbellay ajoute que si l’enseignant jugé par le Tribunal de Sierre est condamné, l’Etat du Valais "l’annoncera sans délai sur la liste de la Conférence suisse des directeurs cantonaux de l’Instruction publique".
Le procès de l’ancien enseignant ne sera pas ouvert au public, seuls les journalistes accrédités auprès des tribunaux valaisans pourront y assister.
Fabiano Citroni/lgr