Airbnb a séduit les professionnels valaisans, souvent aux frais des touristes

Entre décembre 2015 et avril 2019, les appartements et chalets valaisans proposés sur Airbnb sont passés de 1900 à plus de 6600. Cette augmentation de 244% constitue un record pour la Suisse romande. Sur la même période, la hausse pour toute la Suisse a été de 121% (de 13'500 à 30'000), selon le décompte effectué par la RTS sur le site de Airbnb (voir la méthodologie dans l'encadré).

Cette forte progression s'explique notamment par l'arrivée d'agences sur la plateforme. L'utilisation professionnelle de Airbnb est un phénomène largement connu. En Valais, il atteint des proportions inégalées en Suisse romande. Selon Manu Broccard, professeur à l'Observatoire valaisan du Tourisme interrogé dans le 19h30, "les professionnels se sont engouffrés dans cette brèche pour profiter de l'aura marketing".

Des loueurs professionnels

En effet, près de quatre annonces sur dix (39%) proviennent d'acteurs qui proposent au moins 10 logements. A Genève, ces portefeuilles qui laissent supposer une gestion professionnelle ne représentent que 10% de l'offre, et 15% dans le canton de Vaud.

Les experts et entrepreneurs de la branche expliquent que la plate-forme mondiale aurait permis d'atteindre de nouveaux clients et de lutter contre le problème des lits froids. Kathy Berset Solioz, directrice de l'agence Immobilier Vacances dans le val d'Anniviers, estime que le site est devenu "presque malheureusement incontournable". Pour maximiser l'occupation des logements en location elle juge indispensable "d'ouvrir toutes les portes pour faire venir les gens".

Le recours massif à l'intermédiaire Airbnb a, toutefois, un impact sur le porte-monnaie des touristes. Selon l'analyse effectuée par la RTS sur une cinquantaine d'annonces, les prix finaux sont systématiquement plus chers en réservant via Airbnb plutôt qu'en passant directement par les sites des agences.

Jusqu'à 20% plus cher

La RTS a constaté que certaines agences augmentent leur prix lorsqu'elles passent par Airbnb. Le locataire se voit doublement pénalisé: il paie les frais Airbnb et un loyer plus élevé que sur les portails d'agences. A l'arrivée, le surcoût peut dépasser 20%. Dans le 19h30, Kathy Berset Solioz, d'Immobilier Vacances, confirme ces tarifs plus élevés. "C'est un intermédiaire supplémentaire, ils doivent se rémunérer donc c'est plus cher. Le bon plan, c'est de se faire envie sur ces plateformes et de nous contacter directement".

D'autres agences se contentent de préserver leur marge, faisant porter l'ensemble de la charge Airbnb sur le locataire.

Enfin, certains loueurs assument une partie des frais Airbnb en réduisant leur marge, limitant la charge financière portée par le touriste.

A l'arrivée, les clients payent donc presque toujours plus cher en passant par Airbnb. "Plus vous avez d'intermédiaires, plus vous aurez d'acteurs qui prennent leur pécule", explique Manu Broccard. Sur les annonces analysées, le surcoût ne descend jamais au-dessous des 6%. Les agences s'adaptent et et ajustent leurs marges. Seule la commission de Airbnb reste relativement constante, un peu plus de 12% du prix payé par le touriste.

>> Regarder l'analyse de Gaspard Kühn sur la progression de la plateforme Airbnb en Suisse :

Tybalt Félix, Cédric Jordan, Gaspard Kühn