Un coup de massue pour William Grenon, qui estive ses 700 moutons sur l’alpage depuis 38 ans. "Est-ce qu’il faut s’attendre à avoir des attaques chaque nuit? Ça devient invivable. C’est le pastoralisme lui-même qui est mis en péril", s’inquiète-t-il mardi dans le 19h30.
Le berger en est convaincu: "Le loup n’a pas sa place dans nos montagnes". Et il ne croit pas aux mesures de protection. Des chiens, il en a eu, mais ils lui ont posé plus de problèmes qu’ils n’en ont résolus. Il a dû faire face aux plaintes de randonneurs, effrayés par les canidés.
Clôtures électrifiées?
Quant au principe de poser des clôtures électrifiées, il l’estime difficilement réalisable de par la configuration du site. William Grenon est d’autant plus inquiet qu’une nouvelle meute de 7 louveteaux a été repérée dans le Chablais valaisan.
"Pour nourrir une meute, il faut davantage de nourriture. Donc on va avoir plus d’attaques, plus de pression sur les troupeaux qui sont dans la région et sur la faune sauvage", note Yvon Crettenand, biologiste du service cantonal valaisan de la chasse.
Le loup pourrait changer son comportement et les observations diurnes et à proximité des zones habitées du prédateur devenir plus courantes.
Inquiétudes vaudoises aussi
La situation inquiète aussi dans le canton de Vaud où une autre meute a été repérée cette fin d’été. José Durussel, député UDC vaudois, a déposé une interpellation au Grand Conseil. "La population a changé. Les espaces ont changé. Les gens se promènent beaucoup plus qu’avant dans la nature, à vélo. Je suis inquiet, on va pas pouvoir cohabiter", indique-t-il.
Les chasseurs vaudois ont également fait part de leurs inquiétudes à propos du retour du prédateur.
Installation sur le Plateau "peu probable"
Avec l’augmentation des meutes, la question de la cohabitation va devenir de plus en plus lancinante. Et l’équilibre des enjeux, entre préservation d’une espèce protégée et préservation du pastoralisme de plus en plus instable.
Selon l'éthologue et spécialiste du loup Jean-Marc Landry, l'animal devrait néanmoins rester à distance du Plateau suisse. "L’environnement n’est pas adéquat, parce qu’il faut vraiment qu’il y ait un endroit, à partir de juin jusqu’au mois d’octobre, qui soit tranquille, pour que les parents puissent élever les louveteaux", explique-t-il dans le 19h30.
L'expert a également déploré les inquiétudes liées à la présence des bêtes. "Il y a 200'000 personnes qui meurent chaque année à la suite de piqûres d’insectes, et moi ce qui me surprend toujours, c’est pourquoi on se pose la question de savoir si le loup est dangereux pour l’Homme [...] Je pense qu’à l’époque du brâme, un cerf est plus dangereux, ou un sanglier plus menaçant. On doit se poser cette question: pourquoi les politiciens reviennent à chaque fois sur la dangerosité du loup."
Cédric Jordan/nr
Une initiative qui divise le Valais
L'initiative cantonale "Pour un canton du Valais sans grand prédateur" divise le Grand Conseil. En juin 2018, elle avait été jugée contraire au droit fédéral par la Commission de justice du parlement valaisan. La majorité du plénum, bien que partagée sur sa validité, a accepté l'entrée en matière, afin de trancher définitivement la question jeudi.
Lancée conjointement en 2018 par les partis PDC du Haut-Valais (CVPO) et chrétien-social du Haut-Valais (CSPO), le texte avait abouti, soutenu par 9545 paraphes, alors que 6000 suffisaient. Les deux partis de langue germanophone veulent lutter contre la présence du loup, du chacal et du lynx. Ils s'opposent aussi à l'introduction volontaire de l'ours dans le canton. (ats)