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Les communes valaisannes, championnes des nominations tacites

De nombreuses communes peinent à trouver des candidats pour leur exécutif. [Keystone - Jean-Christophe Bott]
Elections communales: La Suisse romande fait face à un taux de nominations tacites particulièrement élevé / La Matinale / 3 min. / le 16 décembre 2019
2020 sera une année d'élections communales, notamment en Valais, où le principal défi est celui de la relève. Le taux de nominations tacites y est particulièrement élevé, ce qui signifie qu'il n'y a pas d'enjeu dans certaines communes.

En 2016, lors des dernières élections communales, une commune valaisanne sur quatre n'a connu aucun enjeu, contre une commune sur cinq en 2012. Dans huit communes haut-valaisannes, il n'y avait tout simplement aucune liste déposée. Il y a donc toujours moins de prétendants au rôle de conseiller ou président en Valais.

A titre de comparaison, à Neuchâtel, aucun exécutif communal n'a été nommé tacitement en 2016 et dans le canton de Genève, cela concernait à peine 10% des communes.

Il y a 20 ou 30 ans, c'était plutôt des gens qui allaient se proposer pour être conseiller. Maintenant, c'est la recherche de candidats qui est importante.

Léonard Moret, président de la commune de Charrat (VS)

Parmi les municipalités valaisannes où les citoyens n’ont pas eu à se rendre aux urnes il y a quatre ans, on trouve Charrat, qui fusionnera d'ailleurs bientôt avec sa grande voisine Martigny. "Il y a 20 ou 30 ans, c'était plutôt des gens qui allaient se proposer pour être conseiller. Maintenant, c'est la recherche de candidats qui est importante, et ce n'est pas toujours simple d'en trouver. On travaille pour les habitants, et ce travail est important, on prend donc aussi sur notre temps", a expliqué à la RTS le président de Charrat, Léonard Moret.

Pris au sérieux par le canton

Fonction toujours plus complexe, peu valorisée et peu compatible avec un emploi… il y a de quoi décourager. Jean-Pascal Fournier, le président des Verts valaisans, a lui dit son souci de trouver un nombre de candidats à la hauteur des ambitions de son parti en 2020.

Maurice Chevrier, chef du service valaisan des affaires intérieures et communales, dit prendre au sérieux ce recul du personnel politique, en accompagnant les communes, en formant les nouveaux élus et en soutenant les fusions. Même si cette formule n'est pas la panacée, selon Andrea Pilotti, chercheur à l’Observatoire de la vie politique régionale de l’Université de Lausanne. "Il n'y a jamais de remède miracle. On a aussi vu que dans certaines communes qui ont fusionné, le taux de relève n'a pas forcément augmenté, en tout cas pas tout de suite. Il y a un travail qui doit se faire au niveau des partis et donc des sections locales pour mobiliser davantage la population, faire un vrai travail de terrain", détaille-t-il.

Le "tabou" de la professionnalisation

Mais le Valais n'est pas le seul canton à connaître un problème de relève. A Fribourg, Neuchâtel, Vaud et Genève, ce sont les démissions en cascade qui inquiètent. Une municipalité sur trois est touchée, selon l'Association des communes suisses qui a déclaré 2019 "année du travail de milice", en quête de solutions.

>> Lire aussi : Fribourg veut lutter contre la vague de démissions dans ses communes et Elire un municipal est une chose, mais le garder en est une autre

Son vice-président Gustave Muheim est lui-même syndic de Belmont-sur-Lausanne et est actif depuis 30 ans à l'échelon municipal. "Il est impératif qu'à l'avenir, les exécutifs locaux s'occupent de stratégie communale et non plus d'opérationnel (...). Cela doit être une affaire des administrations, qui vont devoir se doter des compétences nécessaires", réagit-il. Le but, à ses yeux , est "que les exécutifs (...), peu importe leur profession, puissent en fait réfléchir sur la stratégie du devenir de la commune, ce qui ne nécessite pas obligatoirement une formation universitaire".

Il est impératif qu'à l'avenir, les exécutifs locaux s'occupent de stratégie communale et non plus d'opérationnel.

Gustave Muheim, syndic de Belmont-sur-Lausanne et vice-président de l'Association des communes suisses

L’esprit de milice est profondément enraciné dans les mentalités et dans la culture politique suisse. Et contrarie un peu ce changement. "La professionnalisation reste un tabou" selon le politologue Andrea Pilotti, même si cette évolution paraît inéluctable. Le défi désormais pour les communes: tendre vers plus de professionnalisme sans couper le lien avec la population.

Julie Rausis/jvia

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