Sommée deux fois par le gouvernement valaisan de clore le processus de régularisation des dossiers de constructions illicites, Bagnes avait jusqu'au jeudi 30 septembre pour remettre son rapport final. Il lui aura fallu deux ans pour examiner toutes les autorisations de construire délivrées entre le 2 avril 2012 et le 27 avril 2016, soit 1267 dossiers, relève mercredi la commune dans un communiqué.
Sur ce nombre, elle conclut que 802 décisions rendues par l'ancienne administration sont licites, 75 sont des "bagatelles", soit des cas "sans incidence sur la densité ou sur la législation sur les résidences secondaires" et 101 ne relèvent pas de la compétence communale mais de la Commission cantonale des constructions. En revanche, 289 décisions portant sur 248 projets, dont les trois quarts sont situés dans le secteur de Verbier, posent problème, concède-t-elle.
Règlement des constructions violé
"Le canton a bien reçu ce rapport accompagné de plusieurs centaines de dossiers", a confirmé mercredi dans un communiqué le Conseil d'Etat. Il doit maintenant vérifier si les exigences fixées ont été remplies et se réserve le droit de prendre, le cas échéant, toute mesure utile. Tous les documents reçus seront analysés et contrôlés par un groupe de travail dirigé par le président du Conseil d’Etat, le PLR Frédéric Favre.
Le règlement des constructions de la commune de Bagnes, dont fait partie Verbier, a éclaté il y a un peu plus de cinq ans et a permis pendant des années à des promoteurs et architectes de réaliser des constructions en violation de la loi.
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Des espaces tels que piscine, sauna ou home cinéma n'étaient pas comptés dans la densité constructible. L'affaire sera jugée ultérieurement. Cinq personnes sont prévenues, dont l'ancien président de Bagnes. L'un des chefs d'accusation retenus est la gestion déloyale des intérêts publics.
Le canton également mis en cause
Deux experts indépendants mandatés par la commune de Bagnes constatent que les dossiers litigieux liés à la construction de chalets dans la station valaisanne présentent tous des irrégularités. En avril 2016, le Conseil d'Etat somme Bagnes une première fois de se conformer au droit.
Depuis, plusieurs rapports ont été menés, considérés comme insuffisants, et une seconde sommation a été prononcée en mai 2020. La commune a alors fait recours au Tribunal cantonal, puis fédéral. La plus haute instance juridique a jugé irrecevable ce recours et la sommation du Conseil d'Etat a été actualisée au 30 septembre 2021.
La commune de Bagnes n'est pas la seule à s'être faite sérieusement mettre en cause dans cette affaire. En septembre 2020, un rapport de la commission de gestion du Grand conseil valaisan avait pointé du doigt le gouvernement cantonal, dénonçant sa passivité, ses contrôles lacunaires et sa sévérité à deux vitesses.
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ats/vic
Cinquante-six amendes et des transformations
"Les 289 cas qui posaient problème ont fait l'objet d'une nouvelle décision et ont été régularisés", a indiqué mercredi à l'ATS le président de la commune Christophe Maret. Pendant deux ans, à plein temps, deux personnes et un juriste ont ouvert chaque dossier et analysé plusieurs éléments. Premièrement, la construction était-elle conforme au permis de construire délivré par la commune et celui-ci était-il conforme au droit cantonal. Deuxièmement, la construction réalisée diffère-t-elle des plans autorisés.
Dans ce dernier cas de figure, en cas de violation, une procédure pénale a été ouverte. Selon Christophe Maret, "environ 56 amendes" ont été prononcées pour "plusieurs centaines de milliers de francs". Les coûts sont ensuite partagés entre le ou la propriétaire et l'architecte, selon leur degré de responsabilité dans le dossier. Certains architectes ont ainsi reçu plusieurs douloureuses. "On s'aperçoit qu'il s'agit souvent des mêmes bureaux et que la plupart sont installés à Verbier", note Christophe Maret.
Vérifications renforcées
Dans la grande majorité des cas, les propriétaires et les architectes ont collaboré avec l’administration afin de trouver des solutions à leur dossier de construction. Certaines régularisations sont passées par des transferts de densité. Dans d'autres cas, des habitations sont devenues des résidences principales parce qu'elles contrevenaient à la loi sur les résidences secondaires. Parfois des transformations assez lourdes ont été demandées. Quatre recours contre les demandes de régularisation ont été déposés, détaille le président de commune.
Pour chaque permis d'habitation délivré, l'administration se rend désormais sur place une fois la construction terminée pour contrôler si les plans ont été respectés et s'éviter toute mauvaise surprise, avertit Christophe Maret.