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Le procureur général valaisan et son adjointe épinglés par un rapport

Le procureur général du Valais Nicolas Dubuis a été réélu lors d'une séance à huis clos. [Keystone - Jean-Christophe Bott]
Le procureur général valaisan et son adjointe épinglés par un rapport / La Matinale / 1 min. / le 29 novembre 2022
Dans une étude publiée lundi, le Conseil de la magistrature reproche aux deux plus hauts cadres du Ministère public valaisan de ne pas s'intéresser aux affaires pénales importantes, mais de préférer s'occuper de cas mineurs ou de tâches non-judiciaires.

Tous les membres de la direction, du Bureau du Ministère public ainsi que les magistrats et le personnel administratif de l’Office central, ont été auditionnés, indique lundi l'organe de surveillance de la justice valaisanne dans un communiqué accompagnant la publication du rapport. Une inspection a aussi été menée, le 4 juillet dernier.

"L'enquête a mis en lumière au sein de l'organisation de l'office central une situation préoccupante, avec des responsabilités définies mais non mises en oeuvre, des problèmes de management et de gestion des ressources humaines", écrit le Conseil de la magistrature dans son rapport. Cette situation pèse sur le personnel qui estime qu'il n'y a "pas de cohésion de groupe, pas de discussions collectives sur les dossiers" et que "les liens de confiance ont été rompus", lit-on dans le rapport.

La répartition du travail dénoncée

Les tensions se cristallisent notamment autour de la répartition des dossiers et du travail. Une organisation qui doit être revue à brève échéance, tranche le CDM.

Le Conseil de la magistrature pointe par exemple du doigt le choix "peu compréhensible" de priorisation de tâches du procureur général et de la procureure générale adjointe Lucie Wellig. Les deux magistrats se sont essentiellement chargés de tâches administratives au détriment de leurs autres tâches et, en particulier, des dossiers d'instruction.

Nicolas Dubuis consacre 70% de son temps à de l'administratif. Le procureur général l'a reconnu lors de son audition par le surveillant valaisan de la justice. Le magistrat a aussi admis, qu’à l’instar de son adjointe, il prenait en charge les dossiers les plus faciles et rapides à traiter. Leur intention serait de décharger leurs subordonnés, pour leur permettre de se concentrer sur leurs dossiers. Mais cette manière de faire conduit à ce que les deux plus hauts cadres du parquet se retrouvent à instruire des centaines de cas bagatelles, ce qui n’est pas du goût du Conseil de la magistrature, comme l’explique dans La Matinale sa présidente Carole Basili. "Ce sont deux taux à 100%, les deux plus hauts procureurs du Ministère public. On attend tout de même d’eux qu’ils s’impliquent dans de gros dossiers et aujourd’hui ce n’est pas le cas." Face aux critiques à l’interne et à l’externe, le CDM appelle à une priorisation des tâches.

>> L'interview de Carole Basili dans La Matinale :

Un chanoine valaisan a été dénoncé auprès du ministère public. [KEYSTONE - Jean-Christophe Bott]KEYSTONE - Jean-Christophe Bott
En Valais, un rapport épingle le procureur général. Interview de Carole Basili / La Matinale / 1 min. / le 29 novembre 2022

Le monde politique a souvent critiqué le procureur général pour son manque de leadership et de communication. Le Conseil de la magistrature estime qu'une plus grande visibilité de sa part dans les affaires importantes améliorerait l'image de l'institution. Contacté, Nicolas Dubuis n'était pas en mesure de s'exprimer lundi,  jour de la sortie du rapport. Quoi qu’il en soit, la pression monte encore d'un cran sur ce magistrat, qui avait tenté en vain d'être élu juge cantonal l'année passée.

>> Lire aussi : L'élection à huis clos du procureur général valaisan par le Parlement interroge

Les attentes pas remplies

Pour l'instance de surveillance, les origines de la crise que vit actuellement l'office central remontent à 2018 et 2019, lorsque plusieurs procureurs expérimentés ont quitté leurs fonctions. Tous les postes ont été repourvus par des personnes moins expérimentées dans le domaine spécifique de l'instruction pénale. La procureure générale adjointe, au bénéfice "d'une solide expérience au sein du Ministère public de la Confédération", était appelée à jouer un rôle essentiel.

Dans ce cadre, la procureure générale adjointe n'a ainsi "pas répondu aux attentes définies dans son engagement" en 2019, écrit le Conseil de la magistrature puisqu'elle aurait dû soulager les procureurs en regard de leurs dossiers à traiter et décharger le procureur général, en dirigeant l'office central. Or concernant cette deuxième tâche, le CDM relève que le personnel de l'office central "continue dans une large mesure de s'adresser au procureur général plutôt qu'à elle. Il en est résulté un malaise évident que le procureur général n'a pas réussi à dissiper".

Dans son rapport, le CDM estime aussi que les compétences attribuées au procureur général auraient pu lui permettre de rétablir la situation en répartissant mieux les dossiers à traiter. "A défaut de consensus, on aurait attendu du procureur général qu'il tranche pour le bien de l'institution".

miro/rc avec ats

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Cinq recommandations

Le Conseil de la magistrature émet cinq recommandations, à l’attention du Conseil d’Etat, du Procureur général, de la Procureure générale adjointe et du Bureau du Ministère public. Il s'agit entre autres d'organiser des réunions régulières avec les procureurs de l’office central, afin d’équilibrer leur charge de travail, de prioriser les dossiers susceptibles de prescription ou encore d'améliorer la communication vis-à-vis de l’ensemble des procureurs.